A la Une : quatorze régions

François Hollande a tranché : la France ne comptera plus vingt-deux régions mais quatorze. Dans une tribune publiée ce mardi matin dans plusieurs quotidiens régionaux, le chef de l’Etat dévoile les contours de sa réforme territoriale.
« S’il a choisi d’accélérer sur la réduction du nombre de régions (de 22 à 14) dès 2015, il a en revanche décidé de repousser la fin des départements à 2020 », relève Libération. En effet, précise le journal, « si la réduction du nombre de régions n’était pas de nature à enflammer la classe politique, la suppression des départements était à la fois plus complexe et plus explosive. A droite, bien sûr, puisque l’opposition, tout en soutenant le principe d’une réforme, ne veut pas faire le moindre cadeau au chef de l’Etat. Mais aussi à gauche. »

Et Libération de citer un député socialiste : « anticipant la défaite de 2017, plusieurs députés de la majorité, qui sont à la fois conseillers départementaux ou régionaux, comptaient bien garder leur mandat local, explique-t-il, et auraient pu être tentés de voter contre la réforme. » En effet, relève le journal, « la fin du département aurait nécessité une modification de la Constitution et donc un vote aux 3/5e du Congrès. En clair, sans l’appui de l’opposition, (et qui plus est, sans faire le plein à gauche) point de salut. »
Alors, cette réforme des régions, sans toucher pour l’instant aux départements, est-elle une bonne réforme ?

D’accord, mais…

« Sur le fond, tout le monde est d’accord, constate Le Parisien : le millefeuille territorial coûte une fortune à l’Etat et représente un obstacle à toute forme de simplification administrative. Le réformer, ce devrait être l’assurance d’un 'coup politique' réussi. Exactement ce dont aurait besoin un président de la République à l’impopularité historique. Mais, s’interroge Le Parisien, de valse-hésitation sur l’ampleur et les échéances de ce grand chantier en circonvolutions pour ne mécontenter personne, François Hollande n’est-il pas en train de préparer un nouveau 'flop', un redécoupage du pays qui ne satisfera personne et qui n’économisera pas un seul euro ? »

Des interrogations reprises par bon nombre de journaux ce matin… D’abord, cette réforme va-t-elle générer des économies ? Pas sûr, répond La Montagne : « le millefeuille territorial va conserver une certaine épaisseur et les économies ne seront pas faramineuses. Budgétairement, les personnels régionaux ne représentent que 4% des finances de la fonction publique territoriale. Autant dire que, comme à Bruxelles, on adressera une fois de plus à François Hollande un 'Bien, mais doit mieux faire !' »
« François Hollande veut passer de vingt-deux à quatorze régions. Soit, relève Ouest France. Mais elles ne sont ni plus petites, ni moins peuplées que nombre de régions européennes. Elles sont en revanche dix fois plus faibles en moyens budgétaires et en compétences. Deux pauvres n’ont jamais fait un riche. »

Qui plus est, note encore Ouest-France, « en ouvrant la boîte de Pandore du redécoupage, François Hollande fait des mécontents, y compris au sein de sa famille politique. »

Fronde des élus ?

Et on arrive justement à l’autre grande interrogation : la pilule va-t-elle passer auprès de certains élus, notamment de la majorité ?
« Avant de convaincre la droite, remarque La Voix du Nord, François Hollande devra surtout rallier à son projet les présidents de régions, tous socialistes, à l’exception de l’Alsace. »
« Si la méthode laisse à désirer, on peut au moins attribuer au projet le mérite de commencer à faire bouger les lignes du paysage territorial français, tempère La République des Pyrénées, sans doute un des plus complexes et budgétivores en Europe. Un mouvement est ainsi engagé, dont il n’est pas sûr, estime cependant le quotidien béarnais, qu’il aboutisse d’ici la fin de la législature tant les résistances locales promettent d’être aussi tenaces que disparates. »

Analyse partagée par Le Midi Libre : « si une majorité de Français s’accorde sur la réduction du coûteux millefeuille, la fronde des collectivités impactées par la réforme -en particulier les départements- a de bonnes chances de faire capoter le projet. Face à une telle levée de boucliers, -et dans un contexte difficile pour le Président- la nouvelle architecture risque donc d’être retoquée, l’an prochain, par l’Assemblée nationale. François Hollande le sait, pointe le journal. Pour éviter un refus de sa propre majorité, le chef de l’État pourrait donc passer in fine par une autre voie : celle du référendum. Une option choisie justement il y a 45 ans, rappelle Le Midi Libre, par le général De Gaulle sur… la régionalisation. Si sa décision reste encore secrète, on connaît en revanche le résultat du scrutin de 1969. Et la conclusion qu’en tira, alors, l’illustre Président. »

En tout cas, note Le Figaro, « une trentaine de lois ont été consacrées, en trente ans, à la décentralisation, rendant plus confus les transferts de compétences entre l’État et les collectivités territoriales, et plus criant le manque de transferts de moyens financiers aux départements et aux régions. Si la décentralisation, initiée par les lois Defferre de 1982, qui avaient fait suite à l’élection de François Mitterrand, était une belle idée de création d’un nouveau mode d’organisation territoriale, elle a mobilisé trop d’énergie pour un piètre résultat. » Depuis, remarque encore Le Figaro, « toutes les lois sur la décentralisation ont abouti à un empilement de structures. Reste à savoir si la réforme ambitieuse annoncée par François Hollande va ou non finir dans les tiroirs du ministère de l’Intérieur. »

Une monarchie discréditée ?

Dans les journaux également : l’abdication du roi d’Espagne Juan Carlos… Affaibli par des scandales à répétition et des problèmes de santé, le roi d’Espagne, héros de la transition démocratique, a abdiqué hier au profit de son fils.
« Juan Carlos Ier, l’embourbement d’un Bourbon », s’exclame Libération. Libération qui rapporte notamment les propos du directeur du journal El Mundo, Casimiro García-Abadillo : « son erreur a été de rester sur le trône trop longtemps, affirme-t-il. Il a attendu d’être au plus bas pour laisser le trône à son fils. Pour ce dernier, il ne sera pas facile de redorer le blason d’une monarchie salie et discréditée. »

Le Figaro est plus indulgent : « Juan Carlos n’a pas toujours été exemplaire, relève-t-il. Mais son abdication peut avoir des vertus cathartiques. En passant le témoin à son fils Felipe sans y être absolument forcé par des considérations plus impérieuses que le bien du pays, le roi d’Espagne restaure le prestige de la monarchie, estime Le Figaro, et lui donne une nouvelle chance de représenter l’avenir. »

Enfin, « comme à contre-courant, une figure continue pourtant d’incarner le pays qui la fit reine, relève La Croix : Élisabeth II, qui sera en France dès jeudi pour participer aux cérémonies de commémoration du Débarquement de Normandie en 1944. Reine d’Angleterre et du Royaume-Uni depuis soixante-deux ans, chef d’État de 16 autres pays souverains, elle ne fait pas de politique mais montre que royauté et démocratie peuvent faire bon ménage, lorsque le monarque règne mais ne gouverne pas. »

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