C'est un vrai bol d'air pour PSA Peugeot-Citroën. Il faut dire que l'entreprise avait grandement besoin de cette augmentation de capital qui va s'élever au total à 3 milliards d'euros. Après une année 2012 catastrophique au cours de laquelle 5 milliards d'euros ont été perdus, le groupe a annoncé ce mercredi sa perte en 2013 : quelque 2,3 milliards d'euros. La dette totale est de plus de 4 milliards d'euros. Autant dire qu'il y avait urgence à refinancer une entreprise qui aurait à terme tout simplement été menacée de disparition.
Avec cet argent frais, PSA Peugeot-Citroën garde sa capacité à investir. PSA va pouvoir se développer davantage sur le vaste marché chinois, où l'entreprise veut tripler ses volumes de vente d'ici 2020 et réfléchit à la création d'une quatrième usine à Wuhan, en Chine, chez son nouveau partenaire. Les dirigeants de PSA réfléchissent aussi à la création d'une usine dans un pays émergent à la périphérie de l'Europe pour attaquer un marché stratégique, celui de l'entrée de gamme, un peu à l'image de ce qu'a fait Renault avec sa marque Dacia et son usine de Tanger.
Pour Dongfeng, c'est un changement de dimension
Le groupe public, dont le nom signifie « vent d'est » et qui a été voulu par Mao Tsé-Toung dans les années 1950, revendique la place de deuxième constructeur automobile chinois. Mais pour parvenir à ce résultat, il additionne les ventes totales de toutes ses coentreprises avec ses partenaires, qui sont nombreux, Peugeot, donc, mais aussi le Coréen Kia, les Japonais Nissan ou Honda. Au total, cela fait 3,5 millions de voitures en 2013. Mais sous sa propre marque, Fengsheng (cela signifie « Dieu du vent »), Dongfeng a dû se contenter de 80 000 véhicules l'an dernier. Pourquoi ? Parce que le consommateur chinois veut des produits modernes et stylés. C'est pourquoi il se tourne volontiers vers les marques occidentales.
C’est ce qui intéresse Dongfeng dans cette affaire : avoir accès aux technologies de PSA Peugeot-Citroën, un centre de recherche et développement commun va être créé à cet effet. L'objectif de Dongfeng, c'est d'atteindre les 300 000 voitures vendues sous sa propre marque en 2016. Quant à une éventuelle arrivée sur le marché européen, ce n'est pas pour tout de suite.
Le troisième acteur, c'est l'État français
Il y a un an, le ministre de l'Économie Pierre Moscovici expliquait qu'une prise de participation de l'Etat n'était pas à l'ordre du jour. Mais nécessité a donc fini par faire loi et l'incapacité de la famille Peugeot à trouver une solution dans le cadre historique a poussé l'État, déjà actionnaire du rival Renault à hauteur de 15%, à prendre une participation de 14% au capital de PSA Peugeot-Citroën. Il s’agit d’un engagement à long terme pour Pierre Moscovici.
Comme élu du pays de Montbéliard, berceau historique de Peugeot, il est particulièrement sensible à la question, et il a joué un rôle important dans les discussions. Pour lui, il s'agit de préserver les intérêts français. Il souligne qu'il y a un engagement à ne pas fermer d'usine en France après celle d'Aulnay. Mais les dirigeants de Peugeot ont déjà annoncé leur intention de faire passer l'usine de Poissy de deux à une seule ligne de production, ce qui pose la question de faire la même chose pour d'autres usines françaises du groupe.
Enfin une question reste en suspens : qui va diriger ce nouvel ensemble ? Si Carlos Tavares va s'occuper de la branche automobile, les négociations continuent entre les trois actionnaires principaux pour trouver un président au conseil de surveillance. Il ne devra pas être trop proche des uns ou des autres : État, famille Peugeot ou Dongfeng. Quoi qu'il en soit, il faudra avoir trouvé l'oiseau rare au moment de la visite en France du président Chinois Xi Jinping fin mars.