Contraint en France depuis l'interdiction de la fracturation hydraulique, Total franchit la Manche pour participer à l'essor des gaz de schiste au Royaume-Uni. Le groupe français vient de confirmer hier qu'il prenait 40 % dans deux permis de la région de Gainsborough, à l'est de Sheffield, dans les Midlands, au nord-est de l'Angleterre. Un autre grand groupe français, GDF Suez, avait déjà pris part l'automne dernier à l'exploration des gaz non conventionnels en Grande-Bretagne (au nord-ouest et au nord-est de l'Angleterre). Mais Total est la première major du pétrole à se lancer dans les gaz de schiste britanniques, ce qui devrait donner un coup d'accélérateur au développement de cette industrie. C'est exactement ce que souhaitent les autorités de Londres.
Le Royaume-Uni est le pays le plus empressé d'Europe, avec la Pologne et le Danemark à tirer parti de ses réserves de gaz non conventionnels : quelque 3700 milliards de m3, soit près de 50 ans de consommation britannique actuelle. Des réserves qui permettraient d'enrayer le déclin, même plus lent que prévu, des hydrocarbures en mer du Nord. Alors cela vaut bien aux yeux du gouvernement londonien des ristournes fiscales généreuses aux opérateurs et aux communes où auront lieu les forages, ce qui n'empêche pas l'hostilité des défenseurs de l'environnement de grandir.
De son côté, Total contribue déjà à la renaissance de l'industrie pétrolière en mer du Nord. Avec les gaz de schiste désormais, le groupe français devrait devenir le premier producteur d'hydrocarbures au Royaume-Uni, en doublant sa production d'ici 2015 (à plus de 200.000 barils équivalents pétrole par jour). Une manière pour la compagnie pétrolière d'enrayer son propre déclin au Moyen-Orient : le même jour, Total a vu sa concession de 75 ans arriver à échéance à Abu Dhabi. Pour reconquérir une part du pétrole des Émirats, le géant français du pétrole est désormais en concurrence avec d'autres compagnies, y compris asiatiques.