Le polémiste qui se présente comme anti-système a justement mis au point un ingénieux système… financier qui lui permet d’échapper au fisc, de se déclarer insolvable et de faire fructifier ses avoirs à l’étranger.
C’est le quotidien Le Monde qui révèle l’information. « Les enquêteurs ont trouvé ce que faisait Dieudonné de son argent : il l’envoie au Cameroun. Le comédien, qui doit 887 135 euros au Trésor public, a expédié plus de 400 000 euros au Cameroun depuis 2009, dont 230 000 pour la seule année 2013. »
« Une partie de ces sommes aurait transité par quatre comptes bancaires, précise pour sa part Libération, détenus par Noémie Montagne, compagne de Dieudonné. Par ailleurs, d’après un document du ministère du Commerce camerounais, Dieudonné serait le responsable d’une entreprise créée début 2013 et basée à Yaoundé. Nommée Ewondo, elle se consacrerait à l’importation de lubrifiants en provenance de Dubaï. Aucun des avocats de Dieudonné n’était joignable hier pour commenter ce rebondissement. »
« Le prospère système de “Dieudonné l’antisystème” », titre de son côté Le Canard Enchaîné. Le Canard qui révèle qu’en fait « dès 2007, le petit commerce du bouffon antisémite avait fait l’objet d’un signalement de Tracfin, la cellule anti-blanchiment de Bercy. Ce qui n’avait guère ému les autorités. Ni sous Sarko ni sous Hollande. Jusqu’à la saillie de trop, relève l’hebdomadaire, sur le journaliste Patrick Cohen, un juif coupable d’avoir malencontreusement échappé aux chambres à gaz. » La mauvaise blague antisémite qui a fait éclater l’affaire Dieudonné…
Alors les mesures d’interdiction de ses spectacles prises notamment à Nantes et Tours vont-elles être effectives ? Pas évident, répond Libération : « un arrêté d’interdiction ne signifie en aucun cas que le spectacle “Le Mur” de Dieudonné ne pourra pas se tenir. Jacques Verdier, l’avocat de Dieudonné, a d’ailleurs assuré que son client “agirait immédiatement” contre les tentatives des pouvoirs publics, par le biais d’une procédure de “référé-liberté”. Le tribunal administratif a alors quarante-huit heures pour rendre sa décision. Dieudonné a déjà gagné une quinzaine de procédures sur ce terrain, les juges estimant que la liberté d’expression primait. »
Erreur ?
Dans la presse régionale, cette affaire suscite encore bien des commentaires… Le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a-t-il eu raison de lancer cette croisade contre Dieudonné ? Ne lui a-t-il pas offert un coup de pub inespéré ?
« L’enfer est pavé de bonnes intentions, soupire Le Journal de la Haute-Marne : plus les interdits se multiplient contre le gourou de l’antisémitisme, plus il fait salle comble et plus il cartonne dans les réseaux sociaux. D’une certaine manière, Dieudonné devient maître du jeu. Il joue déjà la carte de la persécution et de la victimisation. Il multiplie les recours judiciaires. Il est clair que la démocratie ne peut pas rester les bras croisés devant ces déferlements de négationnisme. Mais, visiblement, relève le quotidien champenois, elle peine à trouver les bons réglages pour combattre ces funestes infiltrations de néonazisme. »
« En démocratie, interdire une expression publique, comme à Bordeaux, Nantes ou Tours, est une arme délicate à manier, renchérit Ouest France. La censure est une digue construite à la hâte pour contenir les débordements que l’on n’a pas anticipés. Le geste est noble, surtout quand il dépasse les clivages politiques, mais il risque toujours d’être contredit par un recours en justice. Et de placer celui qu’elle vise sur un piédestal, voire d’en faire un martyr, ce dont rêve Dieudonné. (…) On pourrait se taire, conclut Ouest France, se dire que ces lignes sont de trop, que le silence serait une meilleure arme contre la bêtise et l’ignominie. Mais c’est bien connu : qui ne condamne pas cautionne. »
Pour L’Alsace, « le ministre de l’Intérieur a voulu faire taire le sinistre chantre de l’antisémitisme. Erreur. Il a servi d’amplificateur aux provocations du comédien. Le mal est fait. Curieux et vrais fans se pressent aux portes des spectacles de Dieudonné pour admirer le phénomène, comme jadis on allait rire des flatulences du pétomane. Sauf que la baraque de la fête à neuneu a cédé la place à la société du voyeurisme intégral. »
Colère !
A la Une également, l’occupation de l’usine Goodyear d’Amiens. Le Figaro n’a pas de mots assez durs pour condamner l’action de la CGT : « l’affaire Goodyear est, du début à la fin, symptomatique des ravages que peut produire ce syndicalisme de l’extrême. Depuis maintenant sept ans, la CGT d’Amiens-Nord s’échine à réduire à néant toute transformation de ce site, au mépris des intérêts des 1 173 salariés qu’elle prétend défendre. Opposée à toute réorganisation du travail, poursuit Le Figaro, à tout plan de départs volontaires et à toute offre de reprise, elle porte aujourd’hui une immense responsabilité dans ce désastre industriel. »
« Qu’il est malsain ce climat, dénonce pour sa part L’Humanité, où le syndicaliste devient l’empêcheur d’exploiter en rond, de licencier en toute bonne conscience, où le licencié à tort et le licencieur est une belle figure du capitalisme ! Qu’elle est infirme cette justice où le groupe géant entend avoir le droit pour lui et ne laisser aux salariés que celui de se taire et d’accepter l’inacceptable ! »
En tout cas, « cette fermeture, c’est un coup dur pour tout le bassin d’emploi d’Amiens, relève Le Courrier Picard. La colère de ceux qui vont se retrouver sans avenir est compréhensible. Le côté hors-la-loi de l’action syndicale provoque aussi des réactions hostiles. Et tellement d’embarras du côté gouvernemental. »
Et Le Charente Libre de s’interroger : « déjà court-circuités par les bonnets rouges en Bretagne, les syndicats sauront-ils encore tenir et conduire la troupe quand la désespérance frappe aussi fort ? La CGT doit désormais trouver pour les révoltés d’Amiens-Nord une issue acceptable au moment même où sa direction nationale est ballottée par des contradictions qui font tanguer l’ensemble d’un mouvement syndical dont on a tant besoin, plus que jamais. »
David contre Goliath…
Enfin, un autre secteur en péril : celui de la librairie… « SOS librairies de quartier », s’exclame en Une Le Parisien. Les librairies sont en effet de plus en plus soumises à la rude concurrence des fournisseurs en ligne, comme Amazon. « Cet après-midi, le Sénat examinera une loi visant justement, relève Le Parisien, à préserver les librairies, baptisée en coulisses loi anti-Amazon. Objectif : empêcher les fournisseurs de livres en ligne de vendre des ouvrages à des prix inférieurs à ceux imprimés sur les couvertures. Aujourd’hui, Amazon, le géant du secteur, mais aussi Fnac.com appliquent sur tous leurs livres la réduction de 5% autorisée par la loi et offrent les frais de port. Avec un avantage de taille, estime le journal, par rapport aux libraires qui pratiquent la même ristourne : la livraison rapide à domicile et un catalogue immense. »
Une loi nécessaire pour Le Parisien : « si les géants de l’internet continuent leur offensive commerciale, il deviendra difficile d’éviter que nos librairies de quartier, devenues de véritables petits salons où l’on peut tranquillement feuilleter ses ouvrages préférés ou discuter littérature, deviennent un luxe. Ou qu’elles soient obligées de tourner la page. »