A la Une: faut-il censurer Dieudonné ?

L’humoriste français d’origine africaine, connu pour ses diatribes antisémites, se retrouve sous les projeteurs de la presse ce matin. Interdire ses spectacles pour risque de troubles à l’ordre public, comme le souhaite le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, fait débat.

« La polémique a enflé tout le week-end », relève La Croix. « Il a seulement fallu que le ministère de l’Intérieur fasse part, vendredi, de son intention d’étudier “toutes les voies juridiques” pour interdire les spectacles de Dieudonné (…) pour qu’aussitôt l’effroyable machine s’emballe. Réponse des soutiens à l’“humoriste” plusieurs fois condamné : la provocation. Avec force mots et gestes, lâchement relayés voire complaisamment dupliqués sur les réseaux sociaux ou les stades de foot. Provocation à laquelle les opposants ont parfois naïvement réagi, suscitant une nouvelle bravade et de nouveaux soutiens… Et c’est ainsi, constate La Croix, que l’ignoble bêtise a enflé tout le week-end. »

Alors faut-il interdire les spectacles de Dieudonné ? Sur la forme, relève Le Figaro, « aussi sulfureux que soit le contexte, il n’est pas certain que le coup de sang de Manuel Valls soit juridiquement efficace. C’est en tout cas une première pour la Place Beauvau. Jacques Verdier, l’avocat de Dieudonné, s’est empressé de faire remarquer que sur la quinzaine de recours portés par les collectivités en annulation de spectacles, tous avaient été perdus. Le Conseil d’État lui-même a déjà donné tort à la mairie d’Orvault en Loire-Atlantique. Le Mrap, le Mouvement contre le racisme et l’antisémitisme, se dit même “dubitatif” sur la démarche de Manuel Valls. »

Sur le fond, à présent, pour Libération, toute censure serait contreproductive : cela risquerait, estime le journal, « de conforter Dieudonné dans sa paranoïa et sa victimisation. Mais il ne faut pas hésiter à le sanctionner chaque fois qu’il se place hors la loi. Et surtout, aux médias, aux parents, aux éducateurs de faire leur boulot, avec pédagogie. De ne rien laisser passer. (…) Il faut en parler, et surtout expliquer. Sans relâche, s’exclame Libération. Car ce qui fait le plus peur dans toute cette mélasse, bouillie mâchée et remâchée de haines et d’aigreurs, c’est qu’elle touche un grand nombre de personnes, des jeunes surtout, et qu’à ne pas décrypter, on risque la confusion. Dieudonné n’est pas un anar antisioniste et antisystème comme ses fans aiment à le présenter, conclut Libération, c’est un antisémite enfermé dans un délire paranoïaque qui a été condamné à plusieurs reprises pour ses propos. »

C’est donc sur le plan pénal qu’il faut passer à l’offensive, renchérit La République des Pyrénées. « Conduit à une surenchère permanente où il en vient à regretter les “chambres à gaz” pour faire taire un journaliste de France Inter qui refuse de lui servir la soupe, Dieudonné doit être poursuivi sans relâche devant la justice pénale, s’exclame le quotidien béarnais, car l’antisémitisme et le racisme ne sont pas une opinion mais un délit, et c’est d’ailleurs dans ce registre qu’il est régulièrement condamné. Puisqu’il fait commerce de la haine, qu’au moins on le lui fasse payer au prix fort. »

En effet, relève La Charente Libre, « sur le papier, les outrances de Dieudonné relèvent de la justice et d’elle seule. Mais, comme lors des insultes racistes à l’encontre de Christiane Taubira, il appartient bien au politique de tirer les signaux d’alarme et de montrer la voie lorsque l’expression publique fait un commerce débridé du racisme et de la xénophobie. »

Coups de rabot…

On revient au Figaro qui se félicite de la décision du Conseil constitutionnel qui a censuré hier plusieurs dispositions du projet de budget 2014. « Les Sages sanctionnent les excès fiscaux du gouvernement », titre Le Figaro. En effet, commente le journal, « les Sages n’ont pas fait dans la dentelle, en censurant pas moins de 17 mesures significatives du budget 2014, ce qui en dit long sur le délire créatif du gouvernement, dès lors qu’il s’agit d’impôts. Cette sévère correction vient opportunément rappeler qu’il existe des limites à la “boulimie fiscale”. Mais elle ne consolera pas les Français, déplore Le Figaro, qui vont devoir, sitôt les guirlandes du réveillon éteintes, encore mettre la main au portefeuille. Et pas qu’un peu : 6 milliards d’euros, ponctionnés à travers une hausse de la TVA. »

Pour L’Opinion, autre quotidien d’opposition, cette censure du Conseil constitutionnel montre « l’extrême difficulté d’élaborer une loi de finances aujourd’hui, étant donnée l’incroyable complexité du système fiscal français. C’est bien d’une “remise à plat” dont ce dernier a besoin. Mais d’une remise à plat qui passerait par une simplification radicale, une baisse de la pression fiscale et donc une diminution spectaculaire de la dépense publique. En l’état actuel des choses, regrette L’Opinion, c’est un rêve. »

Autre point de vue pour Libération qui insiste sur le fait que le Conseil constitutionnel a entériné la fameuse taxe à 75 % sur les hauts revenus qui faisait débat depuis deux ans. Toutefois, reconnait le journal, « d’une mesure que certains ont interprétée, à l’époque, comme un véritable outil permettant d’encadrer les hauts revenus, le gouvernement accouche finalement d’un dispositif essentiellement symbolique : limité dans le temps, excluant les revenus du capital, et plafonné à un pourcentage du chiffre d’affaires. »

« La victoire est courte et symbolique, concède également La Voix du Nord. Elle ne rapportera que 460 millions d’euros sur deux ans. Mais à l’heure où le redressement de l’emploi et des comptes attend une confirmation nette, tout emblème est bon à prendre pour la gauche. »

Heureux les Français ?

« Les Français sont des râleurs, mais ils ne sont pas aussi pessimistes qu’on l’imagine. Au contraire, ils croient au bonheur… » C’est ce qui ressort d’un sondage publié par Le Parisien en cette fin d’année. « Sursaut salutaire ou pas, cette veille de 2014 nous offre une belle surprise, relève le journal : 71% de nos congénères réalisent la chance qu’ils ont de vivre à notre époque (…). Le déclinisme collectif du pays le plus injustement morose du monde se double d’un bel optimisme individuel ! “Dans les années 80, le bonheur de chacun découlait directement du bonheur collectif”, souligne le sociologue Bernard Cathelat », cité par Le Parisien. « “Aujourd’hui, constate-t-il, les Français, et plus particulièrement les jeunes, se concentrent sur leur personne, leur couple, leur famille… Lorsqu’ils se regardent le nombril, ils pensent souvent qu’ils sont malheureux, mais lorsqu’ils comparent leur qualité de vie au reste du monde, ils se rendent bien compte qu’ils ne sont pas à plaindre”, ajoute le spécialiste. Les chiffres du chômage, la pluie, la fatigue… Tout semble oublié quand on leur parle d’avenir : 71% des sondés disent pouvoir influer sur le cours de leur vie, 74% brandissent des projets personnels… En somme, ils y croient. »

Et Le Parisien de conclure : « Franchement, oublions un instant notre mauvaise humeur, notre manie de râler tout le temps et pour tout, et reconnaissons que nous n’avons pas toujours de bonnes raisons de nous plaindre. »

Partager :