Le thatchérisme, une doctrine en héritage

Margaret Thatcher est décédée lundi 8 avril à l'âge de 87 ans. L'ancienne Premier ministre britannique surnommée la Dame de fer a gouverné de 1979 à 1990, une décennie qui a profondément bouleversé la Grande-Bretagne sur le plan économique.

Cette Dame de fer a laissé en héritage une méthode de gouvernement qui porte son nom, le thatchérisme. Une doctrine très personnelle basée sur une foi absolue dans le libéralisme soutenue par une intransigeance à toute épreuve. Margaret Thatcher n'est pas économiste de formation, elle a fait des études de chimie à Oxford. Et c'est en lisant les penseurs comme Milton Friedmann ou l'Autrichien Friedrich Hayek qu'elle nourrit ses convictions libérales.

Sa grande œuvre en matière économique, aura surtout été de réhabiliter les vertus gouvernementales du libéralisme. Le contexte économique s'y prête : quand elle arrive au pouvoir, la Grande-Bretagne est plongée dans la récession à cause des chocs pétroliers, le keynésianisme qui a si bien marché pendant la reconstruction semble à bout de souffle. Londres est contraint de demander l'aide du FMI en 1976. Le chômage, l'inflation, la désindustrialisation minent la société britannique, le gouvernement de l'époque semble dans l'incapacité de sortir le pays de la crise

Concrètement quelle politique met-elle en place ?

C'est surtout dans son détricotage de l'État providence que son action sera la plus radicale et la plus durable. Les impôts baissent drastiquement, les dépenses de l'État également. Ces coupes sombres correspondent aussi à des choix stratégiques : c'est la fin des subventions aux industries jugées sans avenir comme l'exploitation du charbon. Dans la foulée, les syndicats sont éreintés par des conflits sans issue. Place au marché, y compris dans le monde du travail où les procédures de licenciement sont simplifiées au maximum. Enfin, Margaret Thatcher s'attaque à l'inflation.

Avec quel résultat ?

Elle a réussi à mater l'inflation et à faire revenir la croissance. Son action en matière de lutte contre le chômage est plus mitigée : il reflue, mais reste un phénomène structurel. Et puis la fin du soutien à l'industrie n'endigue pas plus la désindustrialisation que n'a pu le faire le volontarisme des équipes précédentes. En revanche à la faveur de la dérèglementation tous azimuts, La City devient la première place financière européenne. C'est donc un bilan contrasté en termes économiques.

Sur le plan social, ses choix font exploser les inégalités : le dixième de la population le plus pauvre, voit ses revenus se réduire de 10 %, tandis que tout le reste de la population s'enrichit, mais surtout les mieux lotis, le décile le plus fortuné, voit ses revenus grimper de 60 %. En valeur, les dépenses sociales sont inchangées. Mais l'État ne joue plus son rôle d'amortisseur et de redistributeur de richesse. Sous le gouvernement de la Dame de fer, le matelas de l'État providence a perdu définitivement ses plumes.

Ces résultats qui l'ont rendu très impopulaires à la fin de son mandat font souvent d'elle un repoussoir, ses réformes sont pourtant encore bien vivantes en Grande-Bretagne, elles ont été partiellement adoucies, mais jamais remises en cause par ses successeurs, et par l'ensemble des Britanniques. En 1990 les deux tiers d'entre eux pensaient que l'État devait augmentes ses dépenses pour réduire les inégalités. Dix ans plus tard, seulement un tiers partage encore cette opinion.

 

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