Louis Dreyfus Commodities est un acteur très récemment implanté en Colombie, depuis moins de quatre ans. Mais le groupe de négoce d'origine française semble vouloir s'y tailler la part du lion, en tout cas cette année. Les exportateurs observent que Dreyfus multiplie les achats de café colombien, et qu'il ne lésine pas sur les prix pour doubler ses concurrents. Le négociant aurait déjà mis la main sur 6% de la récolte annuelle, qui n'a commencé qu'en octobre dernier. Un soupçon grandit : Dreyfus serait-il en train de préparer un coup, à savoir accumuler une bonne partie de la production colombienne en attendant la remontée des cours de l'arabica, et la hausse de la prime pour l'arabica colombien, le nectar des nectars.
Pour l'instant les cours sont au plus bas depuis deux ans. A un peu plus de 1, 40 dollar la livre, ils ont perdu la moitié de leur valeur depuis mai 2011. Car depuis cette date, où l'on manquait d'arabica, avec une récolte colombienne au plus bas depuis trente ans, l'abondance est revenue, d'abord au Brésil, le géant mondial de l'arabica nature. Et la production colombienne d'arabica lavé s'est redressée, après trois années catastrophiques. Mais à la fin de la récolte principale, en mars prochain, les chiffres pourraient réserver des surprises.
Déjà on révise à la baisse les ambitions colombiennes de mois en mois. Si les cours de New York remontent au premier trimestre de l'an prochain, et si la prime supplémentaire payée pour l'arabica lavé colombien s’envole (elle peut passer de 10 cents à 1 dollar), la tactique de Dreyfus, assis sur des entrepôts pleins d'arabica colombien, aura payé. Sachant qu'il peut conserver les grains trois mois avant de les livrer aux torréfacteurs. Une tactique déjà rodée par le groupe de négoce au Vietnam et en Côte d'Ivoire, où il a pris racine il y a beaucoup plus longtemps.