Le Sénégal interdit les exportations de ferraille

La ferraille au menu de la chronique des matières premières. Le Sénégal vient de décider d’en interdire les exportations. Le décret a été adopté en conseil des ministres, il y a deux  semaines. Les explications de notre correspondante permanente à Dakar Carine Frenk.

Chaque mois, des milliers de containers remplis de ferrailles, peut-être 12 000 tonnes, quittent le Sénégal en direction de l’Inde l’un des principaux acheteurs avec Dubaï et la Chine de ces matières premières secondaires.

Conséquence : une raréfaction de la ferraille sur le marché sénégalais. Qui dit raréfaction, dit hausse des prix d’autant que sur les marchés mondiaux les cours de l’acier ont fortement augmenté. Résultat : le prix du kilogramme de fer récupéré a été multiplié par dix en dix ans au Sénégal, passant de 15 à 160 francs CFA (25 centimes d’euros).

Trop cher, trop rare pour développer l’industrie locale de transformation, pour les petits artisans, les fonderies artisanales, les aciéries, les menuiseries métalliques.

Autre problème pour l’Etat : le marché de récupération de la ferraille est encore aujourd’hui dominé par l’informel. Ce sont souvent des jeunes sans emploi que l’on voit sur des charrettes parcourir les villes à la recherche d’épaves de voitures, de machines usées, de canettes. Bref de tout ce qu’ils peuvent trouver en métal mais aussi tout ce qu’ils peuvent piller : glissières d’autoroute, poteaux, couverts d’égouts ou lampadaires.

Il va sans dire que tous ces récupérateurs ne paient aucun impôt. Ils préfèrent revendre leurs stocks au plus offrant à savoir aux exportateurs. Les circuits sont bien rodés et c’est un manque à gagner pour l’Etat. D’où cette décision du gouvernement de stopper les exportations. Une décision qui ne fait bien sur pas que des heureux. A commencer par les commerçants qui travaillent avec les importateurs.

Pour eux, cette interdiction des exportations va créer au Sénégal une situation de monopole en faveur de la Someta, une société chinoise, la seule qui transforme les métaux. « Elle ne peut pas absorber les fortes quantités de ferrailles collectées », affirme dans la presse le partenaire d’une société indienne basée au Sénégal.

« Cette mesure permettra au contraire au secteur de la métallurgie de se développer ici au Sénégal », répond Mata Sy Diallo, la ministre sénégalaise du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat. « Déjà deux projets d’usines sont en passe de voir le jour, ajoute-t-elle. Avant, notre ferraille était transformée ailleurs elle produisait de la richesse ailleurs, créait des emplois ailleurs au lieu de rester ici. »

Partager :