A la Une : la crise politique à Madagascar

« Bye bye Pretoria » : c’est la Une du quotidien malgache L’Express. Un titre tout à fait explicite. « Andry Rajoelina oppose une fin de non-recevoir, précise le journal, au projet d’une nouvelle rencontre (en Afrique du Sud) entre les chefs de file des mouvances. (…) Il annonce la mise en place d’un gouvernement d’union, avec ou sans les autres mouvances, jusqu’aux élections. (…) Le président de la Haute Autorité se donne deux jours pour régler la question, poursuit L’Express. Pour ce faire, il souhaite impliquer la Grande Muette, qui lui avait fixé un ultimatum jusqu’à la fin du mois d’avril pour présenter une feuille de route claire et vérifiable », rappelle le journal.

Alors, justement, l’armée malgache est sur le qui-vive. « Les Forces armées écoutent et observent », affirme L’Express qui confirme qu’une réunion entre les responsables militaires et Andry Rajoelina va se tenir ce lundi. Et le numéro un malgache pourrait proposer, croit savoir le journal, « la formation d’un gouvernement militaro-civil. De leur côté, poursuit L’Express, les hauts responsables de l'armée et de la gendarmerie se sont réunis ce dimanche, pour une mise au point. Aucune information officielle n'a filtré de la rencontre. Mais des sources au courant du dossier font état d'une volonté d'écouter les suggestions d’Andry Rajoelina avant de trancher. » De plus, relève le quotidien malgache, « il n'est pas exclu que les hauts gradés demandent à l'homme fort de la transition du temps, au-delà des 48 heures annoncées par ce dernier, avant de former un gouvernement d'union. »

Pour Midi Madagascar, autre quotidien malgache, ce projet de gouvernement militaro-civil ne ferait pas l’unanimité au sein de l’armée. D’après une source militaire citée par le journal, « 'les Forces armées restent sceptiques quant à la mise en place de ce gouvernement prévu par le président de la HAT après l’échec de la rencontre des Chefs de file des mouvances qui s’est tenue à Pretoria.' En effet, précise Midi Madagascar, les Forces armées craignent que la mise en place d’un gouvernement militaro-civil ne résolve pas la crise politique actuelle et n’aide pas le régime transitoire à obtenir la reconnaissance de la Communauté internationale.»

Un coup d’Etat en préparation ?

Alors, «que va-t-il se passer maintenant dans l’île ?», s’interroge La Gazette. «Faut-il s’attendre au pire ?» Les commentateurs malgaches évitent soigneusement de lâcher le mot… Leurs collègues du continent n’ont pas les mêmes réserves. Et ce mot, en l’occurrence, «coup d’Etat», on le retrouve dans différents journaux, notamment Le Potentiel en RDC : «cette impasse politique donne à penser que l’armée pourra, si rien n’est fait, fomenter un coup d’Etat militaire dans la Grande île», affirme le quotidien congolais.

En effet, précise-t-il, «l’armée demeure, dans le cas d’espèce, la troisième force qui peut imposer une diplomatie des canons et faire fonctionner des institutions nationales avant la tenue des élections.»

L’Observateur au Burkina fait le parallèle avec le Niger, où le président Mamadou Tandja a fini par être renversé par l’armée : « militaires pour militaires, l’officier qui a fait le tour des casernes du pays pour rassurer Tandja en prêchant la neutralité de l’armée dans la bagarre politico-constitutionnelle entre l’opposition et le pouvoir nigérien de l’époque n’est-il pas le numéro 2 de la junte qui a renversé le même Tandja ? », rappelle le journal qui cite cette phrase attribuée à Néron : « j’embrasse mon ennemi pour mieux l’étouffer ». Alors l’armée malgache va-t-elle embrasser ce lundi Andry Rajoelina, pour mieux l’étouffer ensuite ? Réponse dans les prochains jours…

Journaliste : un métier à risques en Afrique

La 19ème édition de la Journée mondiale de la liberté de la presse : Toufik Boughedir (Tunisie), Paulin Criwa Zéli (Côte d'Ivoire), Patient Chebeya Bankome dit Montigomo (RDC), Martial Ouédraogo (Burkina Faso), Mamadouba Sylla, Aboubacar Lansana Camara et Lamba Mansaré (Guinée), Germain Ngota Ngota (Cameroun), Baya Gacemi (Algérie)… C’est la liste non exhaustive des journalistes disparus dans l’exercice de leur métier en Afrique depuis le début de l’année. Certains sont morts de maladie, d’autres ont été assassinés. Une liste établie par l'Union internationale de la presse francophone. Une liste que l’on retrouve dans différents journaux du continent, dont Mutations au Cameroun. Mutations qui revient longuement sur le cas de Germain Ngota Ngota, 38 ans, patron de l'hebdomadaire Cameroun Express, mort en prison le 22 avril, dans des circonstances controversées : victime de tortures pour ses défenseurs et amis et décédé de mort naturelle pour les autorités. Ce qui est sûr, c’est que son journal avait publié récemment un document qui mettait en cause plusieurs proches de la présidence dans un scandale financier.

Enfin, Liberté en Algérie remarque qu’au-delà des disparitions ou des assassinats, cette Journée Mondiale de la liberté de la presse est aussi l’occasion de dénoncer le quotidien très difficile des journalistes : « enfermés continuellement, écrit-il, dans un monde fait de stress, de salaires infamants (…), d’heures de travail déstabilisantes, d’abus et de pressions multiples. » Un constat valable non seulement pour les journalistes algériens mais aussi pour l’immense majorité des journalistes du continent.

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