Bras de fer entre les aciéristes Ascoval et Vallourec

Le tribunal de grande instance de Strasbourg devait se prononcer ce mercredi 24 octobre sur le sort des salariés de l'aciérie d'Ascoval, située à Saint-Saulve (Nord). L’entreprise est actuellement en redressement judiciaire et bloquée par des salariés en colère. La justice vient de s’accorder un sursis de deux semaines pour statuer sur ce dossier complexe.

Le tribunal de grande instance de Strasbourg se donne jusqu’au 7 novembre pour statuer sur le sort des salariés d'Ascoval. En attendant les 281 salariés de l'aciérie et les élus locaux ne décolèrent pas. Ils sont furieux contre la maison-mère, Vallourec, et contre l’Etat.

Ascoval a été créée en 1975 par Vallourec, une entreprise de 3 000 employés spécialisée dans la fabrication de tubes en acier sans soudure. Elle est devenue Ascoval en 2017 et sa survie, dans cette région particulièrement touchée par le chômage, est aujourd’hui compromise. Il y a bien, sur la table, l’offre de reprise d'Altifort. Mais cette PME franco-belge a besoin d’un apport financier de Vallourec, propriétaire à 40 % de l’aciérie. Apport que Vallourec a refusé. Ce refus signe « l’arrêt de mort de l’usine », a déploré la CGT d’Ascoval. « Vallourec reste sur sa position de croquemort. On va mettre 300 familles au chômage », a pour sa part dénoncé Bruno Kopczynski, porte-parole de la coordination, élu au CE CFDT.

Les salariés se sont tournés vers l’Etat, actionnaire à 16 % de Vallourec via Bpifrance et la Caisse des dépôts. Mardi, la secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Economie s’est rendue à Valenciennes. « Notre responsabilité est de trouver la meilleure équation de sortie », a déclaré Agnès Pannier-Runacher. Elle a promis le soutien du gouvernement pour aider Altifort à « monter un plan qui tienne la route ».

Un plan de reprise controversé

Mais c’est là tout le problème car, selon Vallourec, ce plan ne tient pas la route. C’est d’ailleurs la raison que le groupe a invoquée pour justifier son refus. Il faut dire que la santé de Vallourec est fragile. Il y a deux ans, le groupe a subi un vaste plan de sauvetage. Il a aussi perdu plus de 300 millions d’euros au premier trimestre 2018.

Fondé il y a cinq ans, Altifort s’est engagé à maintenir les 281 emplois existants et d’en créer 133 nouveaux. Il promet également de faire des investissements à hauteur de 140 millions d’euros. En échange, la PME franco-belge demande à Vallourec un accompagnement pour maintenir le volume et les prix des commandes pendant les dix-huit premiers mois qui suivent la reprise.

Altifort évalue ce soutien financier entre 32 et 35 millions d’euros. Mais Vallourec, calcule, lui, qu'il faudrait au moins 51 millions d’euros. La maison-mère estime aussi que le montant global de la reprise, 140 millions d’euros, est sous-évalué et trop risqué. Il faudrait, selon ses prédictions, au moins 200 millions d’euros. Altifort peut apporter 10 millions de fonds propres, mais il a besoin du soutien des banques privées, soutien qui reste conditionné à celui de Bpifrance, lui-même non assuré. Il y a donc trop de désaccords et d’incertitudes.

Bruno Le Maire vent debout

Le ministre de l’Economie était vent debout contre Vallourec ce mercredi matin chez nos confrères de RTL. Vallourec ne peut pas « se laver les mains de salariés qui étaient les siens », a lancé Bruno Le Maire.Il a aussi annoncé que « l’Etat mettrait un euro d’argent public pour un euro investi ».

Mais à Bercy, des voix argumentent qu’il « est difficile de demander de l'argent public alors que le repreneur n'a pas réussi à convaincre d'autres investisseurs de la viabilité de son plan ».

Le ministre de l’Economie devrait rencontrer les salariés d’Ascoval et les élus à la fin de la semaine. A l'occasion du centenaire de l'Armistice de 1918, Emmanuel Macron, lui, entame prochainement une tournée dans les Hauts-de-France, région particulièrement frappée par les guerres mondiales. Les salariés d'Ascoval l’attendent de pied ferme.

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