Le sapin à peine acheté, les décorations accrochées sur le toit de la maison, les lettres au Père Noël enfin postées, la commande de la dinde toujours en attente, mais le premier cadeau presque trouvé, la famille Harvey est dans les starting-blocks pour une nouvelle célébration de Noël pleine de rêve et de magie.
Sauf que nous sommes le 1er décembre à Toronto, qu’il est 5h30 du matin et que Peggy n’a toujours pas retrouvé l'« Elf on the Shelf » acheté il y a trois ans pour la modique somme de 40 dollars. « Dans une heure, mes jumeaux se réveillent et s’ils ne trouvent pas leur lutin comme prévu début décembre, ça va être la catastrophe », confie-t-elle. Car depuis 2005, les familles nord-américaines qui accumulaient déjà les traditions de Noël se sont emparées de cet « elfe sur l’étagère », pour à la fois émerveiller et surveiller leurs enfants.
Une ancienne tradition de la famille
Le lutin sur l'étagère est né d’une ancienne tradition de la famille Aerbersold, une famille américaine typique. Déjà toute petite, la mère, Carol, était bercée par l’histoire de cet elfe : pour savoir qui était sage, qui l’était moins, le Père Noël envoyait un lutin expérimenté dans chaque maisonnée. Il restait toute la journée assis dans un coin pour observer, et retournait tous les soirs au Pôle Nord faire son rapport au grand barbu. Comme il faisait l’aller-retour toutes les nuits, il se posait chaque matin à un endroit différent.
C’est en racontant elle-même cette fable à ses enfants, qu’un jour de 2004, Carol décide d’en écrire un livre, accompagné d’une poupée, vendu, depuis, à plus de 10 millions d’exemplaires aux Etats-Unis. Car le lutin n’est qu'une simple poupée de chiffon déguisé en Père Noël : il devient un membre à part entière de la famille. « Adoptez un elfe et donnez-lui un nom », nous dit la publicité… « Buddy c’est devenu mon copain, explique Adam petit New-Yorkais de 7 ans. Parfois, je lui parle et je lui dis quel cadeau je veux, afin qu'il le répète au Père Noël. »
L’ami des enfants
Si le lutin sur l’étagère devient vite l’ami des enfants, il peut rapidement être la pire hantise des parents : il faut le changer de place tous les matins après sa petite promenade au pôle Nord et le placer aux endroits les moins accessibles possible. Le lutin étant magique (et surtout étant fait de tissus et de plastique), nos chérubins n’ont absolument pas le droit de le toucher, au risque de le voir disparaître pour ne jamais revenir. « C’est un peu le cauchemar de trouver une excuse si on ne l’a pas changé de place deux jours de suite », explique Stephen. « Mais on rigole bien, car tous les soirs, on invente un nouveau scénario : Buddy se bat contre Dark Vador, Buddy drague Barbie, Buddy se goinfre de gâteaux », ajoute-t-il.
« The Elf on the Shelf » est devenu un vrai business avec une croissance de la société productrice de 149 % chaque année depuis 2011. Il est même décliné, pour qu’il n’y ait pas de discrimination, en fille, en noir, avec son renne, en anorak, en veste, en jean… Le site Internet propose des applications, des jeux, une liste de noms au cas où vous seriez en manque d’inspiration « On ne peut plus faire un Noël sans notre lutin, dit Louisa, Française installée en Californie. C’est stressant, mais obligatoire, un peu comme les cadeaux. Il faut dire aussi que ça aide bien pour la discipline. »
Quid en France ?
Une tradition moderne aux allures vintage qui pourrait vite envahir la France : les familles d’anciens expatriés rentrent généralement dans l’Hexagone avec leur lutin et perpétue cette petite routine des fêtes. « Nous avons été obligés d’en acheter un deuxième avant de rentrer en France, raconte Julie, les enfants ne comprenaient pas pourquoi leur elfe ne les accueillait pas chez leurs grands-parents. »
En tout cas après un mois de surveillance, « The Elf on the Shelf » finit toujours par disparaître complètement : dans la nuit de Noël, il rentre définitivement au pôle Nord pour laisser la place au Père Noël.