Chacun a gardé en mémoire ce qui s'est passé à Palmyre, en Libye, avec les destructions par le groupe État islamique de pans entiers de la cité antique, ou encore la destruction des mausolées de Tombouctou par les jihadistes au Mali, en 2012. L'Unesco redoute que la même chose survienne en Libye. C'est pourquoi elle vient de placer sur la liste des sites en péril les cités de Cyrène, Leptis Magna qui était considéré comme la Rome africaine, le site archéologique de Sabratha, les sites rupestres du Tadrart Acacus et l’Ancienne ville de Ghadamès, des temples, des cités gréco-romaines de toute beauté qui sont aujourd'hui menacés. Mechtild Rössler est la directrice du patrimoine à l'Unesco. Il faut agir vite, dit-elle, car les pillages ont commencé.
« Il y a quelques pillages. Comme on a travaillé sur une liste rouge d’objets potentiels, on a retrouvé quelques objets qui vont être restitués. C’est très important pour éviter pas seulement le pillage, mais aussi le trafic illicite des objets. »
« Un cri d’alarme à la communauté internationale »
Reste la question si le classement sur la liste des sites en péril est vraiment efficace pour protéger ce patrimoine ? Comment l'Unesco peut-elle empêcher les destructions ? « D’abord, c’est un cri d’alarme à la communauté internationale, répond Mechtild Rössler, mais cela donne aussi des possibilités. L’Unesco peut lever des fonds avec des donateurs comme on l’avait fait avec l’Union européenne pour la Syrie, pour mieux protéger des sites, pour payer des gardiens, etc., et pour effectuer dans le futur une réhabilitation, une restauration des sites. »
Les villes anciennes de Djenné (Mali)
Outre ces sites libyens, les villes anciennes de Djenné (Mali), un ensemble architectural de cités préislamiques et islamiques sont aussi en péril. Menacées à la fois par les troubles au nord Mali, par le manque d'entretien qui découle de cette situation, par l'érosion, et enfin par l'urbanisation de la ville de Djenné.
Lors de sa 40e session à Istanbul, le Comité du patrimoine mondial a également ajouté 21 sites et œuvres sur la liste du patrimoine mondial et parmi celles-ci l'œuvre de l'architecte Le Corbusier.
Le Corbusier
Le Corbusier (1887-1965) avait déclaré d’avoir commencé dans l’esprit nouveau dans les années 1920 en disant qu’il faut faire du foyer le temple de la famille. Et il s’est efforcé pendant une vie entière de loger des gens. Le Corbusier était un génie, un génie parfois incompris et décrié, mais dont l'œuvre est désormais protégée et reconnue comme une contribution majeure au Mouvement moderne. Dix-sept réalisations du Franco-Suisse, dont dix en France, sont classées. Citons la ville de Chandigarh en Inde, ou la Cité radieuse à Marseille. Il a fallu plus de dix ans pour que ce dossier aboutisse.
« C’est vraiment une œuvre très spéciale, souligne Mechtild Rössler de l’Unesco, parce que cela représente le mouvement moderne. C’était vraiment un enjeu de renouvellement au cours du XXe siècle. C’était aussi la technique architecturale qui répond aux besoins de la société. Dans ce sens, c’était unique au monde. »
Le magnifique massif de l'Ennedi au Tchad
Parmi les 21 sites ajoutés sur la liste du patrimoine mondiale, trois se trouvent sur le continent africain : d'abord le magnifique massif de l'Ennedi au Tchad. Un site mixte, à la fois site naturel, avec ces falaises de grès impressionnantes et un site culturel puisqu'il regorge de peintures rupestres multi millénaire. Et enfin, il y a deux sites au Soudan, le parc national marin de Sanganeb et le parc national marin de la baie de Dungonab et de l’île de Mukkawar. Un récif corallien et mangrove, accessibles aux touristes sur la mer Rouge.