« C'est sûr que les gens ont peur, mais à un moment, on peut pas rester chez soi, il faut faire quelque chose. Il faut se battre, enfin, il faut se battre en s'amusant » lance Dominique Revert, cogérant du Bataclan, la mythique salle de concert parisienne meurtrie par la fusillade de vendredi dernier. « On a fait un concert au Casino de Paris où les gens sont venus. En plus, ils avaient envie de faire beaucoup plus la fête que d'habitude, tout le monde rigolait, beaucoup de gens pleuraient. Les gens dans la salle ont été très solidaires avec les organisateurs. Ils ont remercié la sécurité par exemple. De toute façon, on ne peut pas mettre des chars devant les salles ».
Dans les salles de concert, la vie reprend peu à peu, comme à la Cigale, dans le quartier populaire du 18e arrondissement de Paris, qui avait annulé sa programmation jusqu'à ce mercredi. Le saxophoniste français Guillaume Perret, qui devait y jouer le lundi suivant les
attentats, se souvient : « j’étais à New York le 11 septembre 2001 pour faire des jam sessions. Et le soir même, je suis allé jouer dans un club. C’était une ambiance particulière, très très lourde…Ça aurait été aussi superbe de venir mettre un peu de bonnes 'vibes', mais il y a eu un effet poudre d'escampette, un petit moment d'arrêt en France ».
Dans la capitale, les lieux culturels tentent de résister à la peur, comme le Centquatre par exemple, vaste espace du nord-est de la capitale, qui a rouvert ces portes dès lundi matin avec une sécurité renforcée avec la fouille systématique des sacs des visiteurs. Les grands musées aussi ont rouvert : le Louvre, le Grand Palais ou encore le musée d'Orsay mais le public est encore clairsemé. Le musée Picasso par exemple accueille à peine la moitié des 2500 visiteurs habituels par jour.
Côté cinéma, dans le plus grand cinéma d'Europe, l'UGC des Halles au coeur de Paris avec 27 salles et près de 4000 places, l'ambiance reste tendue et la grille baissée. Côté sécurité, il n'y a qu'un seul point de passage sécurisé par quatre agents de sécurité ce qui complique l'accès aux salles. Mais la fréquentation des salles de cinéma est en chute libre : quelque 65.000 spectateurs en moyenne en milieu de semaine en région parisienne contre un peu plus du double la semaine précédente.
La culture sert aussi à expliquer et décrypter
Côté programmation, la sortie de plusieurs films a été retardée mais d'autres seront bien à la date prévue, comme Les Cowboys, bien que le sujet soit lié à l'actualité puisqu'il raconte l'histoire d'un père qui part en quête de sa fille partie faire le jihad. Son réalisateur, Thomas Bidegain, n'a pas hésité une seconde à maintenir sa sortie. « C'est une position de principe : on ne peut pas se laisser imposer le calendrier de sortie par l'Etat islamique. C'est maintenant que j'ai envie de voir l'histoire d'une cellule jihadiste parce que j'ai besoin qu'on me raconte le monde. Ce n'est pas BFM. BFM [qui] va m'assommer d'images. Là, ça va être un contre-champ, ça va être une explication, c'est un travail de longue haleine, de création de personnages et de vie.»
Même position de principe du côté du Salon du livre et de la presse jeunesse qui se tient traditionnellement début début décembre à Montreuil, en région parisienne. Les enfants ont bien besoin de comprendre pour pouvoir se projeter, a même déclaré la directrice du salon. Et quoi de mieux qu'une histoire qui donne un peu de lumière pour faire reculer l'obscurité ? A propos de lumières cependant, la très populaire et désormais très courrue Fête des Lumières, à Lyon qui rassemble chaque année début décembre près de 3 millions de personnes, a elle été annulée. Elle sera remplacée par une journée d'hommage aux victimes des attentats de Paris.