Mettre en scène son pays, le Portugal, saigné à blanc par la crise, au travers d'histoires entendues ou puisées dans les journaux, c'est le projet monstre auquel Miguel Gomes s'est attelé avec Les Mille et Une Nuits. Film-fleuve où, par l'entremise d'une princesse persane, Shéhérazade, il nous embarque dans une série de contes où s'entremêlent la réalité et la fiction.
Dans les deux premiers volumes, Shéhérazade nous racontait la crise. Dans ce troisième et dernier volet, doutant de pouvoir plaire au roi avec des histoires si tristes, elle s'échappe du palais et parcourt le royaume en quête de plaisir et d'enchantement. Elle nous entraîne dans les calanques marseillaises, un univers coloré et paradisiaque. Puis, dans un ancien bidonville de Lisbonne, chez les « pinsonneurs », ces hommes dont la passion consiste à organiser des concours de chants entre pinsons.
Cela pourrait paraitre futile et c'est poignant. L'enchanté, ce troisième volet de Les Mille et Une Nuits, mérite bien son nom. Miguel Gomes y donne libre cours à toute sa fantaisie. Entre realité sordide et capacité de l'imaginaire à nous réinventer, il y révèle aussi le cœur secret de son projet : filmer les rêves et la douce folie des hommes, comme autant de moyens de résister à la dureté des temps.