Pendant les deux heures de votre film Maïdan, nous regardons dans les yeux d’un peuple qui est en train de faire une révolution. Est-ce que le but de votre film était de regarder dans les yeux de la révolution ?
[Rires] C’est un sujet intéressant. Honnêtement, je ne sais pas à quoi ressemblent les yeux de la révolution. Ce que j’ai vu, c’étaient les yeux des gens qui voulaient un changement. Et j’y suis allé tout simplement, parce que je ne pouvais pas rester ailleurs. J’étais très excité et très concerné par ces événements. Etre sur place était pour moi aussi important que pour n’importe qui d’autre sur la place Maïdan. Quand j’ai commencé à filmer, je voulais juste documenter ces événements. A ce moment, je ne savais même pas si je ferais un film ou pas. Petit à petit, j’ai commencé à structurer les choses. Finalement, le film s’est réalisé.
Il y a beaucoup de chansons patriotiques dans votre documentaire. Maïdan, est-ce un film ou de la politique ?
Premièrement, c’est un film, c’est un travail pour le cinéma. Pour citer Eisenstein, c’est un « montage des attractions ». Ce n’est pas possible de faire un film autrement. Evidemment, en même temps, ce film parle d’événements politiques, de la vie politique d’Ukraine. L’élément politique est également présent dans le film. Pour moi, c’est aussi un film sur l’Ukraine et le peuple ukrainien. Quand vous regardez Maïdan, vous allez avoir une idée à quoi ressemble le pays, les gens. C’est aussi un élément important du film. Et à part de l’hymne national, il y a aussi beaucoup de poésie, de la poésie populaire. Beaucoup des chansons sont des chansons populaires.
Faire après vos longs métrages My Joy et Dans la brume un documentaire sur Maïdan, est-ce que cela représente une rupture dans votre filmographie ou dans votre manière de filmer ?
J’ai déjà fait 15 films documentaires dans ma carrière. Même avant My Joy en 2010, j’avais réalisé pendant de nombreuses années des documentaires. Pour moi, faire ce film est une suite logique de ma carrière. Par contre, d’une certaine manière, ce film était pour moi aussi un essai, une esquisse concernant la forme et la structure cinématographiques. C’est quelque chose que j’aimerais utiliser dans mes prochains films. Par exemple, faire un film sans protagoniste, sans rôle titre.
Maïdan montre exclusivement les mouvements de foule. Il n’y a ni protagoniste, ni héros, aucune trace d’une personne individuelle qui traverse cette révolution ou qui nous guide pendant ces événements. Est-ce que c’était un défi de tourner un film sans pouvoir s’identifier à une personne ?
Si vous regardez mes autres documentaires, vous allez découvrir que dans aucun film n’apparaît un rôle principal dans le sens traditionnel. Ainsi, Maïdan s’inscrit dans ma filmographie. Pour moi, c’est une manière très intéressante de développer le langage cinématographique.
Le film se termine avec la démission du président Ianoukovitch. En quoi votre film Maïdan parle de l’Ukraine d’aujourd’hui ?
L’histoire de Maïdan est terminée, mais l’histoire de l’Ukraine, l’histoire du peuple ukrainien continue. Et on verra dans quelle direction.
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