Greg Germain : «Si je ne lis pas, je meurs!»

Comédien et metteur en scène, originaire de la Guadeloupe, Greg Germain s’est fait connaître en jouant dans les années 1970-80 dans la série télé populaire «Médecins de nuit». C’est une figure incontournable du festival d’Avignon où, dans le cadre de son volet Off, il coordonne depuis treize ans les activités d’un théâtre dédié aux artistes de l’Outre-mer et de l’Afrique. Depuis 2009, il est aussi président de l’association du festival off d’Avignon. En vacances à l’Ile Maurice, Greg Germain a répondu par téléphone aux questions de RFI sur ses lectures de vacances.

Fait-il beau à Maurice ?

Quelle question ! Vous savez, il fait toujours très beau à l’Ile Maurice ! Je suis très content d’être ici, loin des turbulences d’Avignon. Le festival terminé, j’ai fermé mon théâtre et suis parti avec ma famille. Nous nous trouvons quelque part au cœur de la brousse mauricienne. Un lieu sublime nommé Lakaz Chamarel.

Donc, un lieu propice au repos et au divertissement, et pas à la lecture ?

Tout lieu est pour moi propice à la lecture. La lecture est le cordon ombilical qui me rattache à la vie. Si je ne lis pas, je meurs.

Quels livres lirez-vous pour ne pas vous ennuyer pendant vos vacances à Maurice ?

J’ai projeté de faire cette année trois types de lectures. Tout d’abord, des lectures politiques, car je suis de près la politique de mon pays. Je suis parti de Paris avec deux livres politiques, une bio de François Hollande et un essai sur Sarkozy qui fait beaucoup de bruit en ce moment. D’ailleurs, au moment où vous m’avez appelé, j’étais en train de lire Le monarque, son fils, son fief (Éditions du Moment). Je ne le lisais pas, je le dévorais ! Ce livre est une fable politique d’une très grande drôlerie. L’auteur croque avec bonheur les grands du régime Sarkozy. Ils ont tous des noms codés. Le lecteur passe son temps à deviner quels personnages connus se cachent sous ces pseudonymes. Puis, j’ai aussi pris quelques ouvrages d’histoire. Notamment, un livre qui passe en revue les grandes dates de l’histoire de France. Son titre : 1515 et les grandes dates de l’histoire de France (Seuil). C’est un travail collectif et sérieux, basé sur la recherche historique récente. J’adore l’histoire. J’espère apprendre du nouveau sur le grand récit de notre Histoire commune. Enfin, mon troisième volet de lecture, ce sera malheureusement professionnel car j’ai aussi quelques scénarios de pièces à lire pour décider du programme 2013 de mon théâtre, à Avignon.

Avec tous ces livres, votre valise a dû être très lourde. Certains des livres étaient peut-être disponibles en version numérique ?

Comme nous sommes partis à trois, nous avons pu répartir les livres dans les différentes valises. Celles-ci étaient quand même lourdes car je ne suis pas le seul à lire dans ma famille. Il se trouve que ma femme et ma fille qui m’accompagnent à Maurice, aiment, elles aussi, lire. Vous avez raison. J’aurais pu prendre les versions numériques. Je n’ai rien contre. Il m’arrive de temps en temps de lire sur mon ordinateur de poche ce que les professionnels du théâtre m’adressent pour que je leur donne mon avis.

Mais franchement, rien ne remplace le bon vieux livre papier. Il y a un plaisir indicible à tourner les pages, à sentir l’odeur d’un livre neuf. Le numérique ne pourra jamais recréer cette sensation magique que procure le livre papier !

Vous m’avez dit que vous étiez en train de lire quand je vous ai appelé. Vous lisez plutôt le matin, ou la nuit avant de vous endormir ?

Je lis quand je peux. Le livre sur Sarkozy par exemple, je l’ai commencé dans l’avion. Je l’ai lu en revenant des visites de l’île. Je lirai encore quelques pages ce soir avant de m’endormir. 

Avez-vous besoin de vous isoler pour lire ?

Je peux lire n’importe où. Je m’assois et je lis. Si le livre m’intéresse, je peux lire au milieu du pire des vacarmes. J’ai grandi dans une famille nombreuse. Étant le cadet de six enfants, j’ai appris très tôt à m’isoler au sein de la foule. Je lisais alors que mes frères et sœurs couraient autour de moi.

Avez-vous des livres de chevet ?

J’ai deux livres de chevet que je lis constamment. Il s’agit du Traité de Tout-Monde (Gallimard) et de Poétique de la Relation (Gallimard). Les deux sont signés Edouard Glissant, un des plus grands penseurs de notre temps. J’ai découvert Glissant tard. J’ai eu l’honneur de le recevoir dans mon théâtre à Avignon. Il était devenu un ami très cher. Sa pensée est complexe, mais elle est à la mesure de la complexité du monde contemporain.

Diriez-vous que la découverte de Glissant a changé le regard que vous portez sur le monde ?

Oui, bien sûr. Il m’a surtout donné des outils pour repenser l’identité. L’identité est moins une racine que relation à l’autrui. Glissant parle d’identité-rhizome. Sa pensée du tremblement et de la créolisation est aussi très originale. Elle aide à reconsidérer l’humanisme comme un carrefour ouvert à tous les vents et à toutes les influences. Il y a dans la philosophie contemporaine un avant-Glissant et un après-Glissant !

 

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