La Berlinale s’ouvre avec des adieux

Le festival du film de Berlin, l’un des trois grands avec Cannes et Venise, s’est ouvert jeudi soir avec le film du réalisateur français Benoit Jacquot « Les adieux à la reine ».  Dix-huit films figurent en compétition. Au total, environ 400 œuvres seront projetées durant dix jours.

De notre correspondant à Berlin

Depuis ses origines en 1951 au début de la guerre froide, Berlin s’est toujours voulu et cultive toujours l’image d’un festival politique. La 62ème édition ne déroge pas à la règle. Et le film d’ouverture en est l’illustration. « Les adieux à la reine » de Benoit Jacquot ne se veut pas un film historique classique. Comme l’a souligné le réalisateur lors d’une conférence de presse à Berlin, son film se veut une réflexion sur les fins de règne, sur l’attitude des puissants menacés et sur la panique qui se répand dans les couloirs du pouvoir, en l’occurence à Versailles le 14 juillet 1789 et les jours qui suivent.

Avant le festival, son directeur Dieter Kosslick l’avait souligné, les films sur les ruptures et les événements charnières marquent la Berlinale 2012, en compétition comme dans les autres sections. La projection du film de Benoit Jacquot coïncide avec le premier anniversaire de la chute d’Hosni Moubarak en Egypte et la fuite de membres de la cour à Versailles rappelle celle du clan Ben Ali en Tunisie l’an dernier.

On trouvera au festival différents films évoquant le « printemps arabe » ou des drames qui marquent notre époque contemporaine. Le premier film d’Angelina Jolie en sélection officielle mais hors compétition traite des crimes sexuels durant la guerre de Bosnie dans les années 90. Le Canadien Kim Nguyen se consacre dans « Rebelle » à une histoire d’amour tragique entre enfants soldats au Congo. Un autre film en compétition du Hongrois Benedek « Bence » Fliegauf traite lui, à partir d’une histoire vraie, des persécutions dans son pays contre la minorité tsigane. Avec un jury présidé cette année par le réalisateur britannique engagé Mike Leigh, la Berlinale récompensera peut-être comme elle l’a souvent fait dans le passé un film évoquant un sujet politique.

On le saura le 18 février au soir lors du palmarès avec la remise de l’Ours d’or pour le meilleur des 18 films en compétition et des divers Ours d’argent. Parmi les autres films en lice, on trouve celui du Franco-Sénégalais Alain Gomis « Aujourd’hui » et du Français Frédéric Videau « A moi seule ». Trois réalisateurs allemands de la jeune génération qui ont déjà été présents à la Berlinale sont en compétition. Comme depuis son arrivée à la tête du festival, Dieter Kosslick s’est à nouveau efforcé de mettre le cinéma germanique à l’honneur.

Dix ans après son arrivée à la tête du festival du film de Berlin, le directeur dont le mandat vient d’être prolongé jusqu’en 2016 a profondément changé la physionomie de la Berlinale. A tel point que certains se plaignent de s’y perdre en raison du nombre important de sections et autres activités qui sont apparues. La section Generation pour les enfants et les ados a été créée, le Talent Campus accueille les jeunes talents du cinéma de demain qui y rencontrent leurs aînés, un fonds s’est mis en place pour financer des projets de part le monde et le « Kulinarisches Kino » du directeur végétarien se consacre aux films évoquant la bonne chère. A cela s’ajoute une rétrospective du cinéma allemand contemporain, un autre de films plus anciens : en 2012, des films soviétiques de l’entre-deux-guerres seront projetés.

Cette hypertrophie explique aussi un nombre croissant de visiteurs pour un festival qui contrairement à ses deux homologues Cannes et Venise est ouvert au grand public. L’an dernier, plus de 480 000 personnes ont vu l’un des 400 films présentés ; 300 000 avaient payé leur billet d’entrée en acceptant pour cela de faire parfois la queue pendant des heures.

Le bilan de Dieter Kosslick salué pour ses talents de manager et d’entertainer n’a pas toujours convaincu quant au choix des films présentés. L’an dernier, par exemple, la critique a été sévère avec la sélection des films en compétition qui donne son profil à un festival. Le cru 2012 promet de l’avis général d’être meilleur.

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