Première conférence nationale sur l'avortement clandestin au Maroc

Au Maroc, c’est une première. Pendant deux jours les 28 et 29 mai 2010 à Rabat, des médecins, des parlementaires et des associatifs ont débattu de la possibilité d’autoriser l’avortement. « Ensemble contre l’avortement à risque », c’est le titre de la conférence et c’est la fin d’un immense tabou, car avorter est illégal dans le royaume. C’est un crime passible de prison pour la femme ou le médecin qui le pratique. Une interdiction qui a des conséquences quelquefois catastrophiques.

Avec notre correspondante à Casablanca, Léa-Lisa Westerhoff

Tous les jours au Maroc, environ 800 femmes auraient recours à l’avortement. Quelquefois dans des conditions catastrophiques, avec des aiguilles ou des plantes abortives. Car condamné par l’islam et interdit par la loi, l’avortement jette dans la clandestinité toutes les femmes qui le pratiquent.

Une situation qui pour le gynécologue Chafik Chraïbi est tout simplement dangereuse :

« L’interdit n’empêche personne. Les grossesses non-désirées sont là et les avortements sont là. Beaucoup de femmes n’ont pas les moyens de se faire avorter dans le privé. Elles se détournent alors vers un genre d’avortements qui est très dangereux et c’est ce qui m’a révolté. C’est véritablement de recevoir dans mon service ce genre de complications. Il n’y a pas longtemps, une femme est arrivé avec ce qu’on appelle des « comprimés de potassium» qu’elle a mis dans le vagin. Cela brûle le vagin et provoque des hémorragies foudroyantes. On ne peut pas se taire sur ce genre de choses ».

Résultat, le Dr Chraïbi a fondé «L’association marocaine de lutte contre l’avortement clandestin» (il demande que l’avortement soit autorisé dans certains cas) et a organisé cette première conférence. Le débat qui devait se tenir au Parlement a finalement eu lieu à la Bibliothèque nationale. Mais il a eu lieu pendant deux jours, parlementaires islamistes et médecins ont pu échanger leurs points de vue.

Mais le plus dur reste à faire : convaincre les députés de rédiger un projet de loi sur l’avortement, et ensuite obtenir le feu vert du roi Mohamed VI. Pour le moment rien n’indique que c’est à l’agenda du Parlement.
 

Partager :