Nuit d’Arles en Tbilissi

Jusqu'à tard dans la nuit, les Tbilissiens se sont enivrés du meilleur de la photographie mondiale pour ces premières Nuits d’Arles dans la capitale géorgienne. Sur dix écrans placés dans le vieux quartier de Tbilissi, Maidan, et ses bains sulfureux, jusqu’à la place Goudiachvili, ils étaient des milliers à déambuler sous les balcons de bois sculptés et colorés de la ville, avides des images proposées dans ce premier Tblissi Open Air Photo Fest.

Je me sens comme à Arles

Tard dans la nuit, dans le café Pour Pour, Claudine Maugendre, la directrice artistique des « Nuits des Rencontres d'Arles », un des programmes phares du célèbre festival de photographie les Rencontres d'Arles, ne cache pas sa satisfaction : « C’est super, ça a marché. Je me sens comme à Arles ici. » Sur une terrasse de café de la rue Chardin, Levan et Salomé, jeune couple d’étudiants, ne décrochent pas les yeux de l’écran montrant le travail d’un photographe russe, accompagné d’un rap déclamé dans la langue de Pouchkine : « C’est génial cet évènement, de voir les œuvres de tous ces artistes. Nous, les Géorgiens, on est des artistes dans l’âme. C’est pour ça qu’on apprécie à fond cette soirée. » Et le couple aux tee-shirts bariolés de descendre la rue nommée d’après un célèbre voyageur français passé dans le Caucase au XVIIème siècle.

Je n’ai jamais vu une chose pareille

Plus bas, rue Irakli II, juste après la vieille église Sioni, la foule peut admirer le travail de l’agence photographique Picture Tank. Que ce soit l’œuvre audacieuse et très plasticienne d’un Eric Garault avec son Bestiaire de coqs et autres volailles aux crêtes incandescentes, ou la fascinante Table de l’ordinaire de Stéphanie Lacombe, photographies de repas familiaux dans des cuisines françaises des plus banales, avec toiles cirées et abat-jours ringards. « Je n’ai jamais vu une chose pareille, ici on en est resté, depuis l’époque soviétique, souvent à l’idée de la graaaaande photographie, sur des sujets sérieux, et là, je vois des gens qui font des choses très étonnantes avec des sujets qui semblent sans intérêt », se réjouit Eka, une journaliste de 32 ans, au milieu d’une foule majoritairement jeune.

Une nuit européenne à Tbilissi

Place Goudiachvili, au cœur de cette petite république du Caucase encore empreinte de traditionalisme, le travail sur les transsexuels et le Sida de la photographe américaine Nan Goldin tourne en boucle, avec les photographies de l’agence Noor, comme celui de Stanley Greene sur les Routes de la soie devenues Routes de la drogue. A une heure très avancée de la nuit, ils sont encore quelques-uns à se laisser captiver par le récit intime de Nan Goldin. Preuve s’il en est que le Tblissi Open Air Photo Fest est un succès.

Au Pour Pour, Nestan Nijaradzé, une des deux commissaires de l’exposition, avec le photographe Lionel Charrier, nous rappelle le sens de l’évènement : « Nous voulions amener le monde ici, le donner à voir aux Géorgiens. C’est ce dont nous avons le plus besoin », lance-t-elle en conclusion d’une nuit que les organisateur ont voulu européenne dans l’esprit, et en faisant le vœu de rééditer le Tbilissi Open Air Photo Fest dès l’an prochain.

 
 

 

 

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