Manifestations en Albanie après dix mois d’impasse politique

Une première manifestation massive a eu lieu au centre de la capitale albanaise, Tirana, ce vendredi 30 avril 2010. Organisée par l’opposition de gauche, elle doit être suivie samedi 1er mai par une contre-manifestation des partisans du pouvoir.

La principale revendication de l’opposition albanaise, menée par le Parti socialiste, est un nouveau décompte des votes exprimés lors des élections législatives de juin 2009. Des élections qui avaient permis à Sali Berisha, le leader du Parti démocratique, d’entamer un nouveau mandat de Premier ministre, avec l’appui du Mouvement socialiste de l’intégration, du pro-européen Ilir Meta. Mais la majorité parlementaire ainsi que l’exécutif refusent un recomptage des voix en invoquant une décision de la Cour suprême. Autre argument, les élections de juin 2009 ont été supervisées et déclarées conformes aux standards démocratiques par plusieurs organismes européens. Mais les partisans de Sali Berisha ne veulent surtout pas être rendus responsables du blocage provoqué par le bras de fer avec l’opposition, ni être accusés de manque de transparence. Mark Marku, écrivain et député du Parti démocratique de Sali Berisha, affirme que la majorité a proposé une solution politique à l’opposition y compris la création d’une commission parlementaire d’investigation sur les élections.

 L’intégration européenne de l’Albanie risque d’être ralentie

Après des mois de boycott pur et simple, les socialistes albanais ont regagné le Parlement au mois de février, mais ils refusent toujours de participer aux votes. La situation « peut nuire au fonctionnement des institutions en Albanie et empêche l’adoption d’importantes réformes », a déclaré le président albanais Bamir Topi. En effet, des amendements au code pénal ne peuvent être adoptés sans la participation des députés de l’opposition. L’impasse politique à Tirana a mené aussi au blocage des projets d’investissements. Des voix, dans les institutions européennes, ont exprimé leur lassitude devant cette crise politique albanaise. L’Albanie a déposé sa candidature à l’Union européenne il y a tout juste un an, le 28 avril 2009 et Tirana espère actuellement voir les Européens lever l’obligation de visa pour ses ressortissants. Cette mesure, dont ont bénéficié en décembre dernier les Serbes, les Macédoniens et les Monténégrins, est vivement souhaitée par les Albanais, dont certains gardent le souvenir de l’isolement imposé pendant des décennies par la dictature communiste.

L’opposition et le pouvoir essayent de mobiliser la rue

L’opposition albanaise a décidé donc de faire appel à la rue pour obtenir satisfaction. « Elle veut montrer sa force aux yeux de l’opinion publique, mais aussi aux yeux de l’Europe », nous a confié Sherif Bundo, ancien député et ex-ministre socialiste des Finances. Une mobilisation prévue pour durer, du moins du côté de l’opposition. La stratégie envisagée est celle du blocage : tenter de gêner durablement la circulation dans le centre de la capitale Tirana, pour faire ainsi pression sur le pouvoir. Ce dernier compte utiliser les mêmes armes, à savoir une mobilisation populaire à l’occasion du 1er mai et dans les jours à venir. Mais bon nombre d’Albanais sont surtout préoccupés par leurs problèmes économiques alors qu'une certaine lassitude est déjà perceptible dans les rues de la capitale.

Avec Artan Kutra

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