Les archives de Bouaké parties en fumée

Le 20 février dernier, des manifestants ont pillé la mairie et incendié la préfecture de Bouaké. L’envoyé spécial de RFI s’est rendu sur place. Reportage.

 

Le sol de la salle de mariage de la mairie est jonché de bris de glace. A l’intérieur du bâtiment, il ne reste rien. Ibrahima Fanny, le maire de Bouaké, fait l’état des lieux : « Ils ne nous ont vraiment pas fait de cadeau. Je ne sais même pas ce qu’il leur a pris. Tout est saccagé, détruit. Et il paraît que ça s’est fait en moins d’une heure. Moi, je n’étais pas là, j’étais en mission à Abidjan. Ils ont tout cassé. Ce n’est pas grave ça ? Je ne sais même pas où on va se marier maintenant. C’est triste ».

RFI : Et les forces de l’ordre sont intervenues ? 

Ibrahima Fanny : « Non, non, il paraît qu’elles ne sont pas intervenues. Elles ne sont intervenues que lorsque toute la casse était terminée comme s’ils étaient complices ».

RFI : Et les forces de l’ONUCI qui sont présentes ici ?


I.F. : « Ils faisaient la sieste ».

Pour justifier la tardive réaction des Forces nouvelles, le commandant Wattao donne une explication « sans gaz lacrymogènes, on aurait dû tirer à balles réelles pour disperser les manifestants. On nous aurait alors accusés de crimes contre l’humanité », affirme le chef d’état major adjoint de l’ex-rebellion.

A quelques centaines de mètres de la mairie, la préfecture de région est encore plus sinistrée. Devant l’entrée, les carcasses de six véhicules brûlés. A l’intérieur, pas une porte, un bureau, une chaise, n’a été épargnée. Sur le sol, des centaines de documents administratifs : « on était en train de reconstituer l’état civil. Tous les actes de naissance, tous les registres qui ont été reconstitués sont partis en fumée. Les conséquences sont à mon avis nombreuses. Ce qui me choque, je ne veux pas trop parler, évidemment les archives d’une préfecture, c’est trop sérieux ! Si vous brûlez les archives d’une préfecture, qu’est-ce qu’on devient ? Tout le courrier administratif qui était là ? Comment on va reprendre maintenant ? ».

Il était encore difficile d’expliquer la colère des manifestants qui ont visé, en premier lieu, les édifices publics. Les délestages, les problèmes économiques, la rancœur contre les autorités locales, l’absence de perspectives pour les jeunes démobilisés des forces nouvelles, n’y sont sûrement pas pour rien dans cette brusque flambée de violence.

 

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