Redonner l'innocence aux enfants des camps

Six semaines après le séisme, près d'un million et demi de Portoprinciens vivent toujours dehors et beaucoup d'enfants se trouvent dans ces abris provisoires, loin de leur environnement habituel. Pour rompre avec leur détresse quotidienne, des organisations viennent les distraire. Ainsi, Save the Children intervient ainsi dans le camp Saint- Louis, où se trouvent près de 2 000 familles.

Corde à sauter, petit but de football, l'Espas Timoun, l'espace enfant, ressemble à une cour de récréation comme il en existe tant d'autres. Mais les dizaines de jeunes qui s'y amusent, qui rient, vivent depuis plus d'un mois sous les tentes à quelques mètres de là. Avant le tremblement de terre, le site était l’un des meilleurs établissements scolaires de la capitale haïtienne. Aujourd’hui, Saint-Louis-de-Gonzague est devenu un petit village. Dans cet immense camp de fortune, la tente de l’organisation non gouvernementale Save the Children est un havre de paix pour les enfants.

Chasser les souvenirs du séisme

Devant les chutes des garçons à la course en sac, Cathy, 15 ans, rigole. « Moi, je suis venue pour pouvoir jouer et pour oublier tout ce que j’ai dans ma tête, des pensées du tremblement de terre » explique la jeune fille. Privée d’école par le séisme, elle vient aussi dans l’Espas Timoun pour travailler car, au-delà des jeux, les animateurs de Save the Children organisent des cours informels avec les adolescents.
« Avec les enfants de 13 à 17 ans, nous discutons beaucoup autour des sciences naturelles, » explique Pierre-Roger Gérome, le coordinateur de cet espace. « Nous leur faisons connaître le principe de l’érosion, leurs responsabilités face à la nature. Aussi, ils reçoivent une formation simple sur la santé, savoir quels sont les bons gestes pour que leur vie au camp soit plus agréable ».

Les enfants comme les adultes ont vécu avec beaucoup d’intensité la catastrophe du 12 janvier. Difficile pour les plus jeunes de mettre des mots sur leur souffrance. C’est au détour d’activité pédagogique simple qu’ils partagent leurs émotions.
« Nous étions en train de faire une leçon sur la nature. Les enfants ne comprennent pas tous pourquoi la terre tremble alors nous, animateurs, nous leur avons expliqué. De là, ils ont commencé d’eux-mêmes à raconter ce qu’ils avaient vu et entendu lors du séisme » se souvient Pierre-Roger Gérome. « Il y a ici un petit qui a vu sa maison s’écrouler et ses deux parents sont morts. Nous en avons parlé ensemble. Maintenant je ne peux pas dire qu’il en parle avec désespoir, mais les enfants sont forts et ils finissent par s’adapter ».

Normalité dans un quotidien de crise

Redonner aux enfants leur innocence, leur procurer des instants de normalité dans un quotidien de crise. Pour Tanya Wainberg, de Save the Children, tel est l’objectif de l’opération.
« Chaque jour les parents doivent quitter le camp, pour chercher du travail, de la nourriture, en somme un moyen de subvenir à la famille. L’Espas Timoun est un endroit où ils peuvent laisser leurs enfants en sécurité. Et les enfants peuvent s’amuser et vraiment redevenir les enfants adorables qu’ils sont ».
Le week-end, l’organisation Save the children n’ouvre pas sa tente mais seuls, les enfants trouvent à s’occuper. Tous les jeunes du camp Saint-Louis ne viennent d’ailleurs pas participer aux activités. Beaucoup jouent sans l’aide des moniteurs, créant des petites voitures à partir de bouteilles en plastique. Aux abords des camps de Port-au-Prince, beaucoup d’enfants courent pour faire voler leurs cerfs-volants, confectionnés avec les sacs plastiques qui jonchent les allées et les rues de la capitale.

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