Jean Rouch, «Une aventure africaine», sort en DVD

Les éditions Montparnasse, spécialisées dans l'édition de DVD, publient un second coffret de 10 films du cinéaste. Jean Rouch, grand connaisseur de l’Afrique, est mort il y a tout juste 6 ans. Le coffret s’intitule « Une aventure africaine ».

On l'appelait le « sorcier blanc ». Jean Rouch est mort le 18 février 2004, victime d'un accident de voiture mortel alors qu'il était en mission au Niger. L’accident s’est produit sur la route de Tahoua dans l'est du pays. Jean Rouch, grand cinéaste, grand documentariste, grand ethnologue aussi, avait 86 ans.

Jean Rouch est mort au Niger et c’est là qu’il est enterré, dans ce pays qu'il n'a cessé de parcourir en tous sens tout au long de sa vie ; un pays qu'il avait découvert avant la Seconde Guerre mondiale, alors qu'il était ingénieur diplômé de l'Ecole des ponts et chaussées : il part alors pour le Niger pour construire des routes.

Après la mort d’ouvriers foudroyés sur un chantier, Rouch découvre les mystères de la religion et de la magie Songhay.
 

Il entre alors en ethnographie, un peu comme on entre en religion, avec beaucoup de respect et de curiosité pour des rites et des cultures qui lui sont étrangers, sans aucun mépris ni distance.

Après s'être distingué pendant la guerre, Jean Rouch suit les cours des grands ethnologues Marcel Mauss et Marcel Griaule puis repart en Afrique. Il descend en pirogue les 4.200 km du fleuve Niger, effectue d'autres missions, devient chargé de recherches au CNRS tout en étant passionné de cinéma.

Ce proche d’Henri Langlois, fondateur de la cinémathèque française, influencera beaucoup les cinéastes de la Nouvelle Vague en raison de son approche du cinéma vérité, des prises de vue réelle, dans l'action.

Jean-Luc Godard ne disait-il pas : « Jean Rouch n'a pas volé son titre inscrit sur ses cartes de visite : chargé de recherche au musée de l'Homme. Existe-t-il une plus belle définition du cinéaste ? ». On doit notamment à Jean Rouch le film Moi, un Noir, prix Louis-Delluc en 1958, un drôle de documentaire mélangé à de la fiction, racontant la vie et les espoirs de quelques dockers dans le bidonville d'Abidjan. Ce film parmi d’autres car Jean Rouch a tourné plus de 120 films, des fictions et des documentaires, des courts et des longs métrages... 

 
Mieux connaître le cinéma de Jean Rouch 

Les éditions Montparnasse éditent des DVD et poursuivent en fait la préservation et la diffusion des films de Jean Rouch. Un travail entamé il y a quelques années déjà avec un premier coffret qui regroupait les fameux films de fiction ou longs métrages de Jean Rouch, notamment Moi un Noir.

Cette fois, ce second coffret sous-titré « Jean Rouch, Une aventure africaine » regroupe les premiers films documentaires du cinéaste, ses premiers courts métrages, sur les tribus Songhay, sur les fils de l'eau, sur les Dogons aussi.

C'est assez émouvant de découvrir ou redécouvrir Au pays des mages noirs, tourné au Niger en noir et blanc en 1947. C'est le premier court métrage de Jean Rouch, il filme une scène de chasse à l'hippopotame et la raconte.
 

On reconnaît la voix off du cinéaste avec la voix nasillarde des actualités. Le commentaire est un peu cliché... Mais ce n'est pas le fait de Jean Rouch, qui était bien au contraire très respectueux des peuples observés. Ce film, Au pays des mages noirs, il l'avait rapporté de son périple incroyable lorsqu’il avait fait la descente des 4.200 km du fleuve Niger.

De plus, « Au pays des mages noirs » a été diffusé en salles en complément du film de Rossellini, Stromboli. Mais le montage de ce film avait échappé à Jean Rouch. Le documentaire avait été formaté par les Actualités françaises à la façon d'un documentaire colonial. Rouch retient la leçon, et s'applique, pour ses films suivants, à en conserver la maîtrise de bout en bout.

Son second court métrage, qui figure également dans ce deuxième coffret, s'intitule Initiation à la danse des possédés.  Jean Rouch le réalise à la suite de son deuxième voyage au Niger, en 1948. On y voit l'initiation d'une jeune femme, possédée par un esprit, à des danses rituelles.

Ce film impressionne au-delà de ses qualités scientifiques et ethnographiques. Il obtint d'ailleurs le prix du court métrage au festival du film maudit de Biarritz organisé par Henri Langlois et présidé par Cocteau. Un cinéaste était né.

Un coffret pour mieux connaître le cinéma de Jean Rouch

Ce second coffret permettra en effet de mieux comprendre pourquoi Jean Rouch a tellement marqué ses contemporains, non seulement comme ethnologue, amoureux de l'Afrique, mais aussi comme cinéaste, innovant dans le cadrage, le montage, le rythme, inventant le « docu fiction ».

On comprend aussi que c'était un homme et un cinéaste qui aimait rire. Ainsi, ce coffret comporte des perles, comme Foot Girafe et VW voyou, des films publicitaires ou promotionnels tournés en Afrique... On voit notamment des films courts d'une minute comme cette coccinelle parcourant les déserts africains, c'est assez désopilant…

 

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