La Révolution islamique, 31 ans après, la désillusion

Le 11 février 2010, la République islamique d’Iran célèbre son 31e anniversaire. Cette date marque la prise du pouvoir par l’ayatollah Ruhollah Khomeini après des mois de contestation populaire à l’encontre du régime de Mohammad Reza Shah Pahlavi.

Par Maryam Levy

Presque personne n’envisageait une révolution politique en Iran en 1979. Les tensions liées aux difficultés économiques et à un malaise social ne remettaient pas en cause, du moins au début, la légitimité du Shah. L’opposition politique réclamait surtout un assouplissement du régime et une affirmation de l’indépendance nationale. Les erreurs de stratégie du gouvernement ont participé à la précipitation de sa propre chute.

Dès mars 1977, les intellectuels iraniens laïcs et libéraux ont initié un mouvement de contestation. Celui-ci a été favorisé par un adoucissement inattendu du régime impérial. Début 1977, les auteurs d’une lettre ouverte adressée au Shah et critiquant le régime ne font pas l’objet de sanction. Avec un sentiment nouveau de liberté, les intellectuels dénoncent certaines dérives du régime et sont suivis par une partie de la population.

Lorsque les forces religieuses s'allient au mouvement de contestation, les revendications populaires, rassemblées autour de l’islam chiite, connaissent un nouvel élan. En janvier 1978, le régime impérial pense déstabiliser l’opposition religieuse en publiant un article injurieux vis-à-vis du dissident Khomeini, en exil depuis 1964. Mais cette initiative a l’effet inverse de l’impact escompté. Les jeunes, élément constitutif majoritaire de l’opposition religieuse, se retrouvent alors autour de ce personnage pourtant tombé dans l’oubli.

L’année 1978 voit un mouvement sans précédent de manifestations populaires peu à peu relayé par toutes les couches de la société. Sa force repose sur l’alliance pragmatique des marxistes, des islamo-marxistes comme les Moudjahidines du peuple, des libéraux et des islamistes. En janvier, c’est la ville sainte de Qom qui initie le cycle de manifestations. Elles sont suivies par Tabriz, Yazd, Téhéran, Machhad et Ispahan. La répression policière de ces mouvements ne fait que renforcer les aspirations démocratiques.

En septembre 1978, le cycle contestataire est à son apogée lors de grandes manifestations à Téhéran pour la fin du ramadan. Une campagne de désobéissance civile et une généralisation des grèves paralysantes plongent le pays dans une situation de grand désordre. En décembre, la tension est extrême. Les manifestations, qui ne sont plus réprimées, exposent la perte du contrôle par le régime.

A la fin de l’année 1978, Mohammad Reza Shah tente de répondre aux revendications populaires, mais il est trop tard. Les mesures, insuffisantes, qu’il prend ne font qu’accélérer sa chute. La foule de manifestants exige le départ du Shah et le retour de Khomeini.

Le 16 janvier 1979, le Shah quitte l’Iran. Le 1er février, la foule accueille Khomeini, qui se pose alors en leader du mouvement révolutionnaire. Du 9 au 11 février, l’armée impériale se divise entre royalistes et révolutionnaires. La victoire des forces d’opposition démontre l’échec politique définitif du gouvernement. Le soir du 11 février, Khomeini est au pouvoir : c’est la fin de la monarchie en Iran. La République islamique est proclamée le 1er avril. Par la suite, l’éviction politique des libéraux et l’accaparement du pouvoir par les religieux favoriseront une radicalisation du régime islamique, loin de satisfaire les espoirs de liberté et de démocratie.

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