C'était une question de jours, la rumeur concernant un départ anticipé grandissait malgré des démentis répétés du numéro 2, Stéphane Richard. Et c'est par l'intermédiaire d'un mail, que Didier Lombard s'est adressé aux salariés de France Télécom afin de leur annoncer sa décision de passer le flambeau à Stéphane Richard, qu'il présente d'ailleurs comme l'homme de la situation et dans lequel il affirme avoir entièrement confiance pour bâtir un nouveau projet d'entreprise. L'actuel PDG dit avoir pris sa décision dans l'intérêt du groupe, pour « sortir par le haut de la crise sociale » que traverse le groupe, sans jamais employer le mot suicide.
La passation de pouvoir était initialement prévue en 2011 : Didier Lombard passe les commandes un an plus tôt, et c'est bien la « crise sociale » qui a précipité ce changement à la tête de l’entreprise. Didier Lombard emploie le terme de « crise sociale » pour exprimer une année 2009 noire, marquée par une vague de suicides, imputés aux conditions de travail qui se sont dégradées dans l’entreprise. En réalité, c'est bien plus qu'une crise sociale. Les salariés ont vécu ces derniers mois un immense traumatisme avec 24 suicides en 18 mois. Déstabilisé par cette série de drames, Didier Lombard a perdu la confiance des salariés qui lui reprochent d'être resté sourd à leur souffrance au travail et n'ont pas admis ses maladresses de langage, comme lorsqu'il avait parlé de « mode » pour évoquer les suicides.
Un départ anticipé bien accueilli en interne
Les syndicats réclamaient le départ de l'actuel PDG. Les salariés également le souhaitaient vivement et à l'extérieur, les spéculations allaient bon train. Pour les syndicats de France Télécom, ce changement de direction est une bonne chose. C’est l'opportunité de tourner la page et de repartir du bon pied. Stéphane Richard, auparavant directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy, se montre à l'aise dans le dialogue social et rassure les syndicats par sa volonté de faire évoluer les méthodes de management, tant contestées.
Malgré la gravité de la situation, l'actuel PDG du groupe n'a jamais voulu démissionner. Il aura en effet la présidence du conseil d'administration jusqu'au printemps 2011, date prévue de son retrait définitif. Les deux hommes vont donc continuer à travailler ensemble. Mais Stéphane Richard aura les coudées franches pour mener à bien le nouveau projet industriel ainsi que le nouveau contrat social qui seront présentés prochainement. Cette séparation des fonctions à la tête de l'entreprise sera soumise au conseil d'administration le 24 février prochain.