Philippe Séguin est mort

L'ancien ministre et président de l’Assemblée nationale, figure de la droite gaulliste en France, et actuel président de la Cour des comptes, est mort dans la nuit du mercredi au jeudi 7 janvier 2010. Philippe Séguin avait 66 ans.

C'est une vraie perte pour la majorité. Philippe Séguin ne faisait plus de politique depuis qu'il avait accédé à la présidence de la Cour des comptes, mais il restait vigilant en jouant pleinement son rôle de magistrat et en dénonçant toutes formes de mauvaise gestion ou d'abus concernant les affaires de la République. Par exemple, il a récemment pointé les frais de fonctionnement de l'Elysée et provoqué quelques remous dans son camp en donnant des armes à l'opposition.

 
C'était cela Philippe Seguin : un souci constant du collectif. Et c'était plus encore. Un homme honnête, comme on disait dans le temps, un gaulliste que l'on qualifiait de « social » et qui l'était. Autrement dit, un homme généreux, intelligent et vif, si vif qu'il se laissait souvent aller à des colères homériques. Les couloirs de l'Assemblée nationale en vibrent encore et les huissiers parlent volontiers de cet homme qui, président de ladite Assemblée, a toujours cherché à protéger l'autonomie des parlementaires face au gouvernement.

Philippe Seguin avait un sens de l'indépendance qui, en d'autres occasions, se révélera un frein pour sa carrière. Ses amis qui l'aimaient et l'admiraient considéraient également qu'il était incontrôlable et, dans les partis politiques, on n'aime pas trop les gens incontrôlables...
 

Philippe Séguin a bien servi la République à laquelle il était très attaché, qui était même sa vie : plusieurs fois ministre, président de l'assemblée nationale. En 1995, il apporte son soutien à Jacques Chirac. La « fracture sociale », cette perspicace analyse de l'état de la société française, il y est pour quelque chose avec Henri Guaino qui l’avait empruntée au sociologue Emmanuel Tod. Mais il sera mal récompensé puisqu'il ne deviendra pas Premier ministre comme il aurait pu, et avait cru pouvoir le devenir après la victoire de Chirac.

Deux épisodes-clés pour comprendre Philippe Seguin :

Le débat sur le traité de Maastricht en 1992. Seul face à François Mitterrand, très malade, il se montrera attentif et respectueux. Il sera, disons, bon et juste.

Et la campagne municipale à Paris en 2001. Désigné candidat par le RPR, il doit composer avec Jean Tiberi sans parvenir à le faire. Une nouvelle fois, Jacques Chirac ne lui apportera pas son soutien. C'est la défaite. Un an plus tard, il en tire la leçon et se retire de la vie politique.  

Il y a quelques mois, à l'occasion d'un déjeuner, il me disait qu'il était toujours très attentif à la vie politique française et qu'il avait même eu la tentation de revenir jouer un rôle de premier plan en 2007. Mais Nicolas Sarkozy ne lui a pas proposé. Cela ne s'est pas fait. Peut-être parce qu'il restait incontrôlable. Peut-être aussi parce que la politique aujourd'hui n'est plus ce qu'elle était. Trop de probité peut tuer une vocation.

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