Avec notre correspondant à Tokyo, Frédéric Charles
A Hiroshima comme à Nagasaki, Tsutomu Yamaguchi se trouvait à trois kilomètres de l’épicentre. Il travaillait comme ingénieur dans les chantiers navals de Mitsubishi.
Le 6 août 1945 à Hiroshima, terriblement brûlé mais parvenant encore à marcher, il prit le dernier train pour Nagasaki. Là-bas se trouvaient sa famille, son entreprise. Le 9 août, il était en train d’expliquer à ses collègues de Mitsubishi qu’une bombe, une seule, avait détruit toute une ville. Il n’arrivait pas à le croire quand soudain une deuxième bombe atomique explosait au-dessus de Nagasaki.
Nous avons rencontré Tsutomu Yamaguchi le mois dernier dans un hôpital de Nagasaki. Il se sentait mourir, mais sa mémoire était intacte comme au premier jour. Pendant plus d’un demi-siècle, il se sera muré dans le silence. Il n’en est sorti qu’à la mort de son fils, décédé d’un cancer des poumons dû aux radiations à l’âge de 59 ans. La mort de son fils l’avait trop révolté.
Le discours de Barack Obama sur l’abolition des armes nucléaires le réjouissait. Mais c’est la dimension intime de ces deux bombardements que Tsutomu Yamaguchi a subis qui s’éteint avec sa disparition.