C’est un signal fort adressé par les autorités chinoises à tous ceux qui militent pour l’ouverture des droits politiques, qu’ils soient Chinois ou qu’ils soutiennent de l’extérieur les militants chinois. Le message est clair : vendredi 25 décembre, c’est Noël et l’affaire est admirablement orchestrée par les autorités chinoises qui ont choisi la bonne cible au bon moment.
Pourquoi tant d’acharnement ?
Les moyens, l’acharnement, tout porte à croire que les dissidents sont des opposants extrêmement menaçants pour le régime, selon le dossier d’accusation. Liu Xiaobo comparaît pour « subversion contre le pouvoir d’Etat ». Et pour reprendre quelques éléments de la biographie de Liu Xiaobo, nous avons affaire à un intellectuel qui a participé au mouvement pro-démocratique chinois de 1989 ; il est l’un des membres fondateurs, et l’un des rédacteurs de la fameuse charte 2008, adoptée le 10 décembre 2008 à l’occasion du 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, et c’est cela que Liu Xiaobo paye aujourd’hui.
La charte 2008 est-elle menaçante pour le pouvoir chinois ?
La charte 2008 préconise l’adoption d’une nouvelle Constitution, la séparation des pouvoirs, une démocratie législative, une justice indépendante, un contrôle public des fonctionnaires, la garantie des droits de l’homme et l’élection des responsables publics. En substance, les signataires réclament l’établissement d’un Etat de droit. Autant dire que, dans le contexte politique chinois, c’est un projet quasi révolutionnaire qui pourrait bien compromettre la solidité des institutions telles que l’Etat chinois, autoritaire comme nous le connaissons aujourd’hui, veut les conserver. D’ailleurs, selon les observateurs, il s’agit clairement d’un procès politique dont on a soigneusement écarté tout témoin gênant et qui est géré au plus haut niveau de l’Etat.
Pourquoi le régime s’est-il crispé ?
En dix ans, la situation a évolué négativement. On observe en effet que, sur ces dossiers des droits de l’homme et des libertés politiques, elle s’est plutôt dégradée comme en témoigne le procès de Liu Xiaobo qui, malgré le harcèlement, jouissait d’une certaine liberté d’expression.
Pékin a « la grosse tête »
Ce qui a changé, c’est que la Chine a accédé au statut d’hyper-puissance. Nous sommes dans un contexte international dans lequel la Chine occupe désormais une position incontestablement dominante. La Chine s’est éveillée en quelque sorte, et cet éveil favorise ce durcissement qu’il faut interpréter comme une manifestation de souveraineté effarouchée à l’égard de l’étranger considéré comme hostile au régime. Et, paradoxalement, la mobilisation extérieure en faveur de Liu Xiaobo risque au contraire de renforcer la sévérité des juges.