De notre correspondant à New Delhi,
L'objectif de ce projet de loi : s'assurer que les cartes diffusées en Inde sont conformes à la position du gouvernement, en ce qui concerne les contentieux territoriaux avec le Pakistan et la Chine. Islamabad réclame le Cachemire, et Pékin veut un Etat frontalier en lieu et place de l'Arunachal Pradesh. Les deux pays cartographient donc l'Inde sans ces deux régions.
Le deuxième but est d'éviter que des installations stratégiques, telles que des bâtiments militaires, soient identifiées sur ces cartes électroniques. Ces deux points sont déjà régulés par des lois récentes, mais le débat a ressurgi en Inde, car que des terroristes auraient utilisé Google Map pour lancer une attaque contre une base militaire en janvier.
Ce nouveau texte va donc bien plus loin : il oblige toute personne qui veut utiliser, disséminer ou amender une carte à demander préalablement la permission à une autorité, qui sera créée pour l'occasion. Il punit par ailleurs tout contrevenant à une amende pouvant aller jusqu'à 13 millions d'euros, ainsi qu'à sept ans de prison.
Quelles seront les conséquences pratiques si cette législation entre en vigueur ?
Si la loi passe, toutes les compagnies qui utilisent des cartes en papier ou en ligne, depuis Google jusqu'à Uber, en passant par les agences de voyage, devront les faire valider. Une démarche qui prendra trois mois, selon le texte. Mais cette loi vise également des individus en particulier : le chauffeur de taxi d'Uber qui utilise Google Map par exemple, ou n'importe quel détenteur de smartphone.
Toutes les géolocalisations et modifications de ces cartes doivent également être approuvées, ce qui comprend le marquage géographique d'une photo et la localisation d'un restaurant sur Google Map, à titre d'exemple. La formulation actuelle est donc tellement vague qu'elle risque de limiter énormément l'utilisation des cartes sur Internet pour le commerce, mais aussi pour les opérations de secours qui utilisent ces systèmes de géolocalisation.
Quelle est la réaction de la société civile ? Les experts des libertés en ligne ont fermement condamné cette loi. Le gouvernement a ouvert les consultations sur le texte jusqu'au 4 juin, et une campagne a ainsi été lancée par la plateforme Savethemap.in pour inciter les internautes à réagir, et demander au gouvernement de restreindre la portée de cette loi.