Il était 0h40 TU ce dimanche 7 février lorsque les stations de suivi nord-américaines ont détecté la mise en orbite d’un objet. Sa trajectoire spécifique, polaire et héliosynchrone à 500 km d’altitude, correspondait à un satellite d’observation de la Terre. Son nom : Kwangmyong 4.
En décembre 2012, les Nord-Coréens avaient déjà réussi la mise sur orbite de sa version 3. Mais le satellite n'avait jamais fonctionné. Il embarquait à l'époque un appareil pour prendre des photos de la Terre et un émetteur radio très haute fréquence pour diffuser des chants patriotiques. On peut donc supposer que cette nouvelle version embarque le même type de matériel.
Mais au-delà de ce satellite, Pyongyang est accusé d'avoir en réalité mené un test de missile balistique déguisé. Car en apparence rien ne distingue vraiment une fusée d’un missile. « La fusée utilisée pour lancer des satellites, qui est officiellement la fusée Unha est aussi un missile balistique de la classe Taepodong. Il y a donc des technologies duales, à la fois civiles et militaires », précise le spécialiste de la Corée du Nord Antoine Bondaz.
Dans le cas présent, on en est cependant encore très loin. Un missile balistique intercontinental a pour particularité de voler en partie dans l'espace, ce qui lui permet de couvrir une très longue distance. Mais lorsqu’il pénètre de nouveau dans l’atmosphère, sa vitesse et les frottements de l’air peuvent le consumer entièrement. Seule une technologie très pointue permet d’éviter cette éventualité. Et visiblement, les Nord-Coréens ne la possèdent pas encore.
Le risque d'une course aux armements
Ce tir a eu néanmoins une première retombée concrète : la Corée du Sud a accepté d’ouvrir des négociations officielles avec les Etats-Unis pour installer sur son territoire le bouclier de défense antimissile américain baptisé THAAD, rapporte notre correspondant à Séoul, Frédéric Ojardias.
Cela faisait des années que Washington essayait de convaincre son allié sud-coréen d’installer ce système considéré comme l’un des plus avancés du monde. Mais Séoul s’y refusait, de peur de froisser Pékin. La Chine considère ces équipements de surveillance ultra-sophistiqués américains comme une menace la visant directement. La Russie y est aussi fermement opposée. Pékin et Moscou accusent le THAAD d’être une menace pour la stabilité de la région.
Mais le succès du tir nord-coréen a changé la donne. La Corée du Sud affirme être obligée à présent de se défendre. Ce bouclier antimissile est aussi pour Séoul un moyen de faire pression sur une Chine qui ne réussit pas à contrôler son allié nord-coréen et qui refuse de lui imposer un véritable embargo économique. Ce tir de la fusée nord-coréenne risque ainsi de provoquer une nouvelle course aux armements en Asie du Nord-Est.