De notre correspondante à Pékin,
Un simple clic suffit pour dénoncer votre meilleur ennemi. La très puissante Commission centrale d’inspection disciplinaire vient de créer une page web pour que chacun puisse participer à « la chasse aux renards » c'est-à-dire à la traque planétaire des Chinois corrompus.
Ils seraient à peu près 18 000 officiels ou employés de sociétés d'Etat partis à l'étranger avec 100 milliards d'euros au total depuis 1990. Alors, pour appeler tout brave citoyen à contribuer à la lutte anti-corruption, il y a ces slogans : « Dites non aux enveloppes rouges » ou encore « Bienvenue aux internautes chinois et étrangers qui souhaitent dénoncer quelqu’un ».
Tout le monde peut participer
Le site internet est traduit en anglais et accessible depuis l’étranger. Pour convaincre, la Commission donne de bons arguments : « Des officiels corrompus ont ruiné le code éthique et la morale du parti, ils ont déshonoré le parti et le gouvernement, miné la justice sociale et provoqué des ressentiments dans l'opinion publique. C'est pour cette raison qu'ils doivent répondre à la justice. »
Une campagne réussie
Il est trop tôt pour dire si les internautes se ruent sur ce site web. Mais, la « chasse aux renards », ouverte depuis juillet dernier, est un succès. Selon un bilan du ministère de la Sécurité publique, 428 suspects ont été arrêtés dans 60 pays ces six derniers mois. Parmi eux, 231 se sont dénoncés eux-mêmes, dans l'espoir d'une sanction plus clémente.
A ceux qui sont encore en fuite, le ministère lance cet appel : Rentrez avant le 31 décembre pour voir vos peines réduites et gare aux autres qui coulent encore des jours tranquilles à l'étranger. « Tant qu'il reste le moindre corrompu en fuite, la chasse va continuer », a averti le vice-ministre de la Sécurité publique Liu Jinguo.
Les cachettes des fugitifs
Leurs pays favoris sont les Etats-Unis, le Canada et l'Australie. Mais, il y en a également en France. D’ailleurs, Paris attend que les autorités chinoises lui envoient une liste avec une dizaine de noms, selon le français Robert Gelli, directeur des Affaires criminelles au ministère de la Justice qui s’est rendu récemment à Pékin.
Il faut dire qu’un accord d’extradition qui date de 2007 n’est toujours pas ratifié, mais Monsieur Gelli n’exclut toutefois pas de coopérer avec la Chine. Il se dit prêt par ailleurs à confisquer les biens mal acquis en France. Les Chinois réclament par exemple des informations sur une villa à Nice achetée par la femme de Bo Xilai, cet ex-officiel de haut rang condamné à la prison à vie en 2013.