Les deux dirigeants issus de la droite nationaliste se retrouvent sur un pan idéologique bien sûr, mais ont aussi pour objectif de renforcer leurs relations politiques et économiques dans la région. « Le Japon, pour l’Inde, a vocation à être un partenaire stratégique important, estime Christophe Jaffrelot. Et ceci pour toute sorte de raisons. La première est géopolitique : ces deux pays ont en commun la peur de la Chine. Et même s’ils commercent tous les deux beaucoup avec elle, ils ont tous les deux une inquiétude forte vis-à-vis de la puissance chinoise. Deuxièmement, ces deux pays ont des complémentarités économiques fortes. Aujourd’hui le Japon est l’une des parties prenantes les plus importantes de ce qu’on appelle le corridor Bombay-Bangalore, qui est un corridor où on va essayer d’équiper les moyens de communication, mais aussi les zones industrielles. »
De très nombreuses compagnies sont en effet installées en Inde, et ce, depuis très longtemps. Ainsi, rappelle le politologue, dès les années 70, Suzuki a été le premier constructeur automobile à investir en Inde. « Ça a donné une marque commune, Maruti, qui domine le marché automobile indien. Donc les raisons de se rapprocher davantage encore du Japon sont vraiment très nombreuses. »
Potentiel nucléaire
Les deux dirigeants pourraient aussi en profiter pour s'entretenir de la question du nucléaire, l’Inde cherchant en effet à développer son potentiel dans ce domaine.
« Le nucléaire représente très peu de son bilan énergétique, confirme Christophe Jaffrelot. Le Japon a des forces, des ressources dans ce domaine.» Mais la relation n’est pas aussi simple à établir dans ce domaine. Le Japon a un passé, qui a été évidemment actualisé par Fukushima. Et d’autre part, contribuer au développement du nucléaire dans un pays comme l’Inde, où la sûreté n’est pas forcement au rendez-vous, ce n’est pas si facile.
« Là, on a le sentiment que Modi a besoin de technologie japonaise, notamment pour conclure le marché des EPR (troisième génération de réacteurs nucléaires, conçu par Areva, NDLR) dont deux sont en cours d'acquisition par l'Inde. Or, ces EPR requièrent des technologies que les Japonais maîtrisent. Il est certain que là il y a un lien stratégique, qui va d’ailleurs de pair avec l’autre visite que Modi va faire dans la région prochainement, l’Australie. Là-bas, c’est l’uranium que l’on va chercher à acquérir. L’Inde cherche à desserrer la contrainte énergétique, et notamment en se développant dans le nucléaire. »