La colère de la jeunesse mongole

Des paramilitaires sont déployés dans les rues de Mongolie-Intérieure ce lundi 30 mai 2011. Cette province chinoise qui couvre un sixième de la superficie du pays est en proie à l’agitation depuis la mort d’un berger d’ethnie mongole écrasé par un chauffeur Han, l’ethnie majoritaire en Chine, qui transportait du charbon. Accusés de surpâturage par les Han, les nomades mongols estiment de leur côté que leur bétail est menacé par les projets industriels et urbains. Mais au-delà de cela, l’incident du 10 mai est aussi la goutte d’eau qui a fait déborder le vase de la frustration et de la colère, notamment chez une partie de la jeunesse.

L’avertissement a été formulé par les chefs de classe : interdiction de se joindre aux manifestations, interdiction de relayer les mots d’ordre. Depuis samedi 28 mai, les étudiants de Hohhot sont cantonnés sur leur campus. L’université de Mongolie-Intérieure et ses plus de 23 000 élèves est totalement bouclée, même chose pour l’université Normale destinée à former les professeurs qui iront enseigner aux nomades.

Quarante personnes auraient déjà été arrêtées, assure le Centre d’information sur les droits de l’homme en Mongolie du Sud. Car c’est bien de la jeunesse qu’est partie la fronde. « On a eu des menaces, on n’a pas le droit de sortir », nous a confié l’un de ces étudiants sous couvert d’anonymat.

« Faux mongols »

Le jeune homme a peur de parler. Il témoigne néanmoins de sa frustration. L’ethnie mongole constitue 20% de la population de la Mongolie-Intérieure, « en réalité la langue mongole est en recul et beaucoup de Han se font passer pour nous », poursuit-il. La mention de l’ethnie sur la carte d’identité permettant notamment d’accéder plus facilement à des aides sociales ou à l’université, en raison de la politique de discrimination positive menée dans la province.

Beaucoup de ces jeunes disent espérer une plus grande autonomie, à l’image de la minorité coréenne de la préfecture autonome de Yanbian. Les six millions de Mongols de Mongolie-Intérieure ne peuvent espérer pour l’instant bénéficier du même soutien. L’économie de l’Etat mongol au nord de la Chine et ses près de 3 millions de citoyens étant loin d’égaler celle de la Corée du Sud. Quant à l’opposition interne, elle est solidement muselée. Libéré après quinze ans de prison, l’un de ses leaders, Hada, est d’ailleurs toujours en résidence surveillée.

Internet limité

Afin de tenter de calmer les esprits, les autorités ont arrêté deux Han, sans pour l’instant parvenir à apaiser la colère. « Soyez certains (…) que les suspects seront punis sévèrement et rapidement, pour que les droits des victimes et de leurs familles puissent être préservés », a déclaré Hu Chun Hua en s’adressant aux étudiants mongols. Le secrétaire général du Parti communiste de la province devrait d’ailleurs se rendre une nouvelle fois dans les établissements scolaires ce lundi 30 mai, affirme la télévision New Tang Dynasty.

Comme si le déploiement des forces de l’ordre ne suffisait pas à dissuader les manifestants, ni même les caméras vidéos sur les immeubles, la police locale a également envoyé des avertissements aux habitants par SMS, en leur demandant de ne pas se joindre à des « rassemblements illégaux », affirme le Apple Daily. Internet fonctionne de manière intermittente dans la province, poursuit le site d’information Hongkongais.

Contacté par les internautes, le fournisseur d’accès China Unicom aurait répondu que des « exercices antiterroristes » avaient lieu en ce moment sur le réseau.

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