Avec notre envoyé spécial à Morioka, Frédéric Charles
Ce qui frappe en arrivant dans la région de Tohoku, dans le nord-est du Japon durement touché par le séisme et le tsunami, c’est que les survivants que nous rencontrons n’emploient jamais le mot : mort.
Quinze jours apres le séisme et le tsunami qui ont durement touché la region du Tohoku, au nord-est du Japon, certains survivants commencent à céder au désespoir. Forcés de vivre dans des centres d'accueil surpeuplés, ils manquent encore de nourriture, de médicaments et de quoi se chauffer.
Pour évoquer des parents, des amis emportés par la vague, ils disent seulement qu’ils sont sans nouvelles d’eux. L’océan Pacifique a pourtant déposé sur la plage des centaines de cadavres dont ceux de nombreux écoliers. Des mères de la petite ville d’Ishinomaki ont insisté pour s’occuper de ces corps laissés sur la plage pour s’assurer que leurs enfants ne se trouvent pas parmi eux et garder ainsi espoir.
On ne peut qu’entrer sur la pointe des pieds dans ces villages dévastés par le tsunami. Dans ce Japon rural, pauvre, dur à la tâche, on se heurte souvent, chez les survivants à un silence insupportable.
Des travailleurs chinois boucs émissaires ?
Quinze jours après le séisme et le tsunami, manquant souvent encore de nourriture, de médicaments, d’eau, certains survivants commencent à perdre leur maîtrise de soi et à divaguer. Ils ne se sentent pas en sécurité, disent-ils. Ils n’osent pas sortir seuls la nuit. Ils assurent que des femmes ont été attaquées à l’arme blanche et que même un policier a été poignardé.
Des voyous s’en prendraient à eux parce qu’ils portent souvent avec eux le peu d’argent qu’il leur reste. Ces voyous ressemblent à des Japonais, parlent un peu le japonais mais avec un fort accent chinois. De nombreux Chinois, plus pauvres que les survivants, travaillent comme journaliers dans des fermes de la région. La police ne note pas une hausse de vols ou de crimes commis par ces Chinois.
Alors servent-ils de boucs émissaires ? En 1923, après le séisme qui détruisit Tokyo, plusieurs centaines de Coréens furent massacrés par des Japonais qui les accusèrent d’être responsables des incendies causés par les tremblements de terre.