Conférence de Nagoya: bataille feutrée autour de l'exploitation des ressources génétiques

Jusqu'au 29 octobre, le Japon accueille la 10ème conférence de la Convention sur la diversité biologique. Elle rassemble des représentants des 193 pays signataires du traité. Si les Etats membres doivent trouver les moyens d'enrayer la disparition de nombreuses espèces, ils vont surtout discuter du partage et de l'exploitation des ressources offertes par la nature.

La dégradation de la biodiversité ne fait pas débat, probablement parce qu'elle est facilement observable, à la différence du changement climatique. Sébastien Montcorp, le directeur France de l'UICN, l'Union internationale pour la conservation de la nature, rappelle l'évidence de la dégradation de la bioversité : « La biodiversité dans le monde est dans un état alarmant : une espèce de mammifère sur quatre, une espèce d’oiseau sur huit ou encore une espèce d’amphibien sur trois sont menacés, donc risquent de disparaître de la planète. On sait qu’il y a un rythme d’apparition et de disparition naturel des espèces mais aujourd’hui, on est sur un rythme d’extinction qui est de 100 à 1000 fois supérieur au rythme des précédentes ères géologiques ».

Cette observation est confortée par de nombreuses études scientifiques bien qu’il n'existe pas encore d'organisme indépendant pour faire une synthèse des connaissances scientifiques en la matière, comme le fait le GIEC (Groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat) pour le réchauffement de la planète. S'il voit le jour, le projet IPBES, le «GIEC de la biodiversité», permettrait de combler ce manque. 

Les outils juridiques pour protéger la biodiversité

La communauté internationale s'est dotée d'un certains nombre d'outils, d'accords internationaux comme la CITES qui réglemente le commerce des espèces et la Convention sur la biodiversité. Il s'agit du document de référence au niveau mondial. La convention a été lancée en 1992 au Sommet de la terre, à Rio. La CDB réunit 193 Etats membres et elle vient d'ouvrir sa dixième conférence, à Nagoya.

Les objectifs de la convention

Le texte s'articule autour de trois piliers. Le premier objectif est de conserver les différents éléments de la biodiversité : les gènes, les espèces et les écosystèmes.

Le 2ème pilier est d’assurer l'utilisation durable de la biodiversité notamment en ce qui concerne l'exploitation des ressources halieutiques ou l'utilisation des milieux agricoles.

Et le 3ème grand objectif, au cœur des discussions de cette 10ème conférence, est «l'accès et le partage des avantages découlant de l'utilisation des ressources génétiques issues de la biodiversité ». Un concept expliqué par Raphaël Billé, directeur du programme biodiversité et adaptation à l'IDDRI, l'Institut du développement durable et des relations internationales : « L’accès et le partage des avantages, c’est d’une part –pour ce qui concerne l’accès- garantir aux entreprises des pays du Nord et des secteurs notamment pharmaceutique, cosmétique ou des centres de recherche, qu’elles pourront accéder aux ressources génétiques qui se trouvent dans les forêts tropicales des pays du Sud, et garantir cet accès dans des conditions correctes ; et puis dans le même temps garantir le partage des avantages c’est-à-dire garantir que le profit que ces entreprises tireront des ressources génétiques, qu’elles auront été piocher dans les pays du Sud, sera redistribué dans les pays du Sud dans des conditions équitables ».

Les autres sujets de discussions à Nagoya

La conférence de Nagoya devrait adopter un plan stratégique ambitieux et réaliste pour les 10 prochaines années, plan qui devrait se décliner en une vingtaine de programmes d'actions. On attend aussi l'adoption d'un accord contraignant sur l'accès et le partage des avantages évoqués plus haut et enfin, que la question du financement, et donc de l'engagement des Etats pour financer tout cela, soit posée.

Une conférence très technique

Nagoya va être le centre de négociations très techniques avec comme toujours, des alliances à géométrie variable entre Etats lorsqu'ils ont des intérêts communs. Il faut rappeler que les Etats-Unis n’ont pas ratifié la conventionbiodiversité et n’ont qu'un rôle secondaire. Enfin ce traité, dont les principes ont été fixés en 1992, insiste sur la responsabilité du Nord à l'égard des pays du Sud.
 

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