Avec notre envoyé spécial de retour de la frontière, Benjamin Delille
Comme tous les jours, à côté du pont Simon Bolivar, une longue file d’attente se forme. Avant de pouvoir passer en Colombie, Jose Angel et Maria doivent faire tamponner leurs passeports. Après un an de préparation, quelques heures d’attente en plus ne les dérangent pas.
Ils quittent une partie de leur famille, dans le centre du pays, pour des raisons tristement simples : « Si on ne mange pas et qu’on ne se soigne pas, comment vit-on ? Ici, il n’y a ni nourriture, ni médicaments, donc c’est vite vu », confie Maria.
« Nous devons continuer à émigrer si l’on veut survivre »
L’arrivée de Juan Guaido, l’espoir d’un changement, la transition politique, ils y ont cru. Mais brièvement, précise Jose Angel : « Ça ne suffit pas à changer nos plans. Cela fait, je ne sais pas, trois ans qu’on nous dit presque chaque jour : "Ça va s’arranger", mais ça ne s’arrange pas. Il n’y a plus d’espoir. »
« On nous dit que le gouvernement va partir demain, puis après-demain, puis dans un mois… Tous les Vénézuéliens font en sorte qu’il parte. Que faire de plus ? Il ne part pas », se désole-t-il.
Et ce n’est pas l’aide humanitaire, bloquée de l’autre côté du pont, qui va les convaincre de rester, explique Maria : « Nous devons continuer à émigrer si l’on veut survivre. J’ai mes deux enfants avec moi, ils ont 4 et 5 ans. Ce qui m’importe le plus, c’est leur alimentation, parce qu’ils sont en pleine croissance. »
« On changera d’opinion quand le gouvernement s’en ira »
Il faut donc partir, subir un long voyage, six à sept jours pour gagner Lima au Pérou, à pied ou en bus, selon les opportunités. Partir pour mieux revenir, espère Jose Angel : « On changera d’opinion quand le gouvernement s’en ira. Là, tous les Vénézuéliens rentreront. »
Derrière eux, la file d’attente n’en finit pas. Plus d’un millier de Vénézuéliens qui refusent de subir la crise en attendant un dénuement qui n’arrive pas.
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