Trump «s’en prend à l’Etat de droit» lorsqu’il attaque la Cour suprême

Passe d'armes totalement inhabituelle entre Donald Trump et le président de la Cour suprême américaine. Après la suspension lundi 19 d’un décret présidentiel instaurant sur les demandes d’asile de migrants entrés illégalement dans le pays, Donald Trump a dénoncé l’existence d’une justice politisée. Le juge John Roberts, qui est pourtant conservateur, s'est senti dans l'obligation de s'exprimer et réaffirmer l’impartialité des juges. Le président américain a toutefois poursuivi affirmant l’existence de « juges pro-Obama ». Qui était visé ? Réponses de Corentin Sellin, Professeur agrégé d'histoire et spécialiste des États-Unis.

Sur Twitter, le président américain a poursuivi la polémique sur Twitter répétant que, pour lui, il y avait des juges « pro-Obama », qui prennent des décisions « choquantes » et qui entravent sa politique anti-immigration. Il visait ce que l'on appelle « la cour d'appel du 9ème circuit », qui inclut la Californie. Un juge californien a notamment suspendu un décret du chef d’État qui instaurait un rejet automatique des demandes d’asile déposées par des migrants ayant traversé illégalement la frontière.

Cette passe d’armes, entre un président américain et la Cour suprême, « est absolument rarissime, analyse Sellin, professeur agrégé d'histoire et spécialiste des États-Unis, coauteur de Les États-Unis et le monde (1823-1945), paru aux éditions Atlande. La seule comparaison, mais dans un contexte complètement différent, remonte à 1937, lors de la réforme souhaitée à l’époque par Franklin Roosevelt, de la Cour suprême. On voit donc qu’on a un événement historiquement très rare ».

« Ce qui est étonnant c’est que Trump, cette fois-ci, s’en prend, avec la Cour suprême, à l’institution qui garde encore aux États-Unis la meilleure image, poursuit-il. Même si la nomination récente très controversée, du juge Kavanaugh l’a peut-être un petit peu ébréchée. Mais la Cour suprême est beaucoup plus populaire que le Congrès, que la présidence. Et c’est très surprenant que Donald Trump s’en prenne ainsi, même si on remarque qu’il le fait quand même en termes beaucoup plus courtois que dans d’autres polémiques, qu’il s’en prenne ainsi publiquement au président de la Cour suprême. »

« La Cour d’appel du 9e circuit est celle qui couvre la juridiction de Californie, en particulier, explique le spécialiste. Et il se trouve effectivement que, par le hasard des retraits, des décès et des nominations, cette Cour d’appel est aujourd’hui peuplée en majorité de juges nommés par Obama et Clinton. Et comme elle couvre la région d’une grande partie de la frontière avec le Mexique, elle a souvent rendu, ces derniers temps, des arrêts contraires à la politique migratoire et restrictive voulue par l’initiation Trump. Ce qui fait enrager non seulement Trump, mais aussi les conservateurs. »

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