Avec nos envoyés spéciaux aux Cayes, Stefanie Schüler et Marc Kingtoph Casimir
A la lumière du petit matin, à Port-Salut comme à Roche-à-Bateau, le paysage est apocalyptique. Les seules habitations à avoir - à peu près - résisté à la violence du passage de l’ouragan Matthew sont les maisons en béton. Toutes les autres ont été au mieux gravement endommagées, au pire réduites à néant.
La côte a été touchée de plein fouet. Les habitants des deux villes font ce qu’ils peuvent pour reprendre leur vie au milieu des débris et d’une nature ravagée. Tout ce qu’ils ont pu sauver des décombres est exposé au soleil : des vêtements, des matelas, des couvertures, des livres et des documents officiels.
Aux dernières nouvelles, selon les autorités haïtiennes, l'aide est enfin en route. Ce samedi matin, dix camions, envoyés par le gouvernement et chargés de nourriture, d’eau potable et de médicaments, partiront de Port-au-Prince en direction des villes côtières du sud. Quatre autres ont déjà été envoyés la veille dans la ville des Cayes.
Le risque d'un nouvel exode vers la capitale
Mais pour l'heure, les habitants des villes côtières comme Port-Salut sont livrés à eux-mêmes. Et un sentiment d’abandon s’est installé au sein de cette population qui manque de tout et qui ne comprend pas pourquoi l’aide tant attendue n’est toujours pas arrivée.
Le visage de Wilson Dénard traduit la fatigue et l'angoisse des derniers jours. Le maire de Port-Salut s'inquiète particulièrement pour les populations de certaines sections communales de sa ville, dont il est toujours sans nouvelle depuis mardi. Et pour survivre, les habitants du petit centre-ville pourraient bientôt partir vers Port-au-Prince.
Wilson Dénard craint que ce nouvel exode rural vienne grossir encore un peu plus les quartiers défavorisés de la capitale. Mais « si les gens n'ont pas d'eau, pas de nourriture et pas de vêtements, s'ils dorment à la belle étoile, la mairie seule ne pourra pas leur venir en aide et du coup, on ne pourra pas empêcher leur départ », explique-t-il.
« Nous allons exiger de nouvelles normes »
Le maire de Port-Salut demande à la communauté internationale « d'agir vite pour que les gens voient au moins une lueur d'espoir. Parce que là, ils n'ont rien ! Je veux qu'on les traite dignement. Dans aucun autre pays sérieux, on abandonnerait une population pendant quatre jours dans de telles conditions. »
Si le maire de Port-Salut appelle la communauté internationale à l'aide, il est tout de même conscient que des efforts doivent aussi être menés au niveau local pour éviter à l'avenir des catastrophes d'une telle ampleur. « C'est la raison pour laquelle nous allons exiger de nouvelles normes de construction sur les zones côtières », dit Wilson Dénard.
« A l'avenir, chaque personne qui voudra construire devra avoir l'autorisation de la mairie. Donc, au niveau de la mairie, nous allons accorder beaucoup d'importance aux normes de construction. Si toutes les constructions avaient respecté les normes, on n'aurait pas eu autant de dégâts », observe l'élu.