Dans Haïti, dévastée par l'ouragan Matthew, les habitants tentent de faire face

Outre les dégâts matériels, quelque 300 personnes ont perdu la vie dans la tempête tropicale qui a balayé Haïti, selon le sénateur Hervé Fourcand, qui conteste le bilan officiel d'une centaine de victimes. Le sud du pays, dont il est un élu, a été particulièrement touché et notamment la ville côtière des Cayes. Les habitants sont à pied d'œuvre pour sauver ce qui peut l'être dans leurs maisons dévastées et, face aux promesses d'aide des organisations internationales, se montrent sceptiques car ils ont en mémoire le fiasco de la gestion post-séisme en 2010.

Les traces laissées par Matthew sont visibles dès que l'on quitte Port-au-Prince. Et plus on s'avance vers le sud de la péninsule de Haïti, plus les dégâts deviennent importants, rapporte nos envoyés spéciaux, Stefanie Schüler et Marc Kingtoph Casimir. Tous les champs de bananiers et autres cultures agricoles ont été détruits. Les troncs nus de cocotiers, dépouillés de toutes leurs feuilles, se dressent vers le ciel.

Nous avons croisé sur notre route quelques engins lourds qui tentent de dégager la chaussée des coulées de boue. A certains endroits des glissements de terrain semblent avoir provoqué de véritables avalanches de roches et de pierres. Dans la petite ville de Cavaillon, le marché n’est plus qu’un vaste terrain boueux. A quelques mètres, une foule entoure la dépouille d’un homme posée à même le sol.

Nous avons ensuite longé la ville des Cayes pour nous diriger vers Port-Salut, puis Roche-à-Bateau (écoutez le reportage en bas de l'article), deux localités très prisées des touristes. A la nuit tombée, c'est un paysage apocalyptique que l'on a traversé : arbres pulvérisés, maisons détruites, maisons englouties par des vagues de dix mètres de hauteur. Et l'ensemble du réseau électrique est au sol.

Partout, les habitants sont sous le choc. Une grande partie de la population dort à la belle étoile et personne ici ne sait de quoi demain sera fait. Aucune équipe d’évaluation ou d’aide humanitaire n’est encore arrivée jusqu’à eux.

Les Haïtiens pour aider Haïti

Aux Cayes, les habitants sont déjà à pied d'œuvre pour réparer ce qui peut l'être, rapporte notre correspondante Amélie Baron. Alors que les promesses d'aide commencent à être formulées par les organisations internationales, les victimes de l'ouragan se montrent sceptiques car elles ont en mémoire le fiasco de la gestion post-séisme en 2010.

Les pieds dans la boue, au milieu des troncs d'arbres abattus sur des dizaines de maisons, les habitants du quartier Sous Roche travaillent tous pour replacer sur leurs toits les quelques tôles qui ont pu être récupérées. Cette solidarité, c'est la solution pour Chéry Junior Jétro : « Je crois que pour sortir de la terrible situation dans laquelle on est, il faut une collaboration totale de tous les Haïtiens, parce que si on laisse la société continuer comme avant, à chaque désastre naturel, il y aura beaucoup d'autres victimes et de dégâts, donc on doit se battre pour trouver une solution quand même. »

Les Haïtiens pour aider Haïti, c'est le crédo de Gédéon Dorfeuille, qui est plus que critique face à l'aide étrangère : « Le travail, c'est à nous de le commencer avant tout. Je ne crois pas en l'aide internationale. Après le séisme, on a dit que 6 milliards avaient été dépensés mais six ans après, Port-au-Prince n'a pas changé. L'aide dont on a besoin, c'est pas l'argent mais du matériel. Et surtout pas l'armée comme ça s'est passé le jour d'après le séisme quand le peuple avait besoin d'eau potable. Et qu'est-ce qu'on a vu ? Les Américains débarquer avec leurs armes. »

Dans leur quartier dévasté, les sinistrés s'activent sans attendre. Ni l'aide de l'Etat ni celle surtout donc de l'international.

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