Ce n’est un secret pour personne, Barack Obama a plus d’affinités avec François Hollande qu’avec son prédécesseur. Mais au-delà de la simple étiquette politique, l’amélioration des relations entre ces deux puissances est le fruit de la politique étrangère mise en place par la France depuis 2012. Pour Jean-François Pactet, membre du CSIS (Centre for strategic and international studies), le point de départ de ce retour en grâce de Paris, c'est le sommet de l’OTAN à Chicago, en mai 2012. « François Hollande, lors de ce sommet, a mis en œuvre une de ses promesses de campagne qui était le retrait des troupes combattantes d’Afghanistan et il a en même temps réaffirmé le partenariat avec les Etats-Unis ».
Le Mali, l'intervention qui a changé l'image de la France
Cet ancien diplomate français estime qu' « à partir de là, la relation est parti sur le bon pied. Ensuite il y a eu le rapport Védrine qui a confirmé à la fois l’engagement français pour l’Europe de la défense, mais en même temps la volonté de coopérer de façon entièrement pragmatique avec les Etats-Unis pour ce qui concerne la sécurité dans le monde. Et puis ensuite les opérations françaises au Mali et en République centrafricaine, là encore je crois qu’il y a eu une coopération franco-américaine très forte dès les étapes initiales au Conseil de sécurité (ONU) en matière de diplomatie et en matière de négociation des conditions qui permettaient à cette opération d’intervenir ».L’engagement français au Mali est donc, selon lui, un facteur déterminant dans cet embellissement des relations franco-américaines. « Je crois que les Américains ont été impressionnés par le succès français au Mali, analyse-t-il. Ils sont impressionnés par la détermination française à s’impliquer et à agir et c’est un des éléments de la coopération franco-américaine qui marche vraiment de façon très satisfaisante aujourd’hui ».
La Syrie, l'autre dossier qui rapproche
Deux autres dossiers ont également favorisé l’amélioration des relations franco-américaines : le dossier syrien et celui du nucléaire iranien. Malgré quelques points de divergences, les deux pays semblent avoir le même discours. Ces deux dossiers, couplés aux interventions au Mali et en Centrafrique ont littéralement changé l’image qu’ont de la France les Américains, quelles que soient leurs tendances selon Keneth Weinstein, directeur du think tank conservateur Hudson Institute : « La France se trouve aujourd’hui presque dans la position inverse par rapport à l’époque de la guerre en Irak. La France est très respectée en tant que puissance militaire qui sait ce qu’il faut faire face aux islamistes. Elle est devenue la voix occidentale la plus importante contre l’extrémisme. La France se trouve donc aujourd’hui dans une situation tout à fait paradoxale : elle est désormais appréciée par la droite, par le Wall Street Journal, par les néoconservateurs, par des gens de centre-droit comme John McCain. Des gens qui critiquaient fortement la France en 2003 ».
La vie sentimentale du président français, sujet de choix pour la presse
S’il y a un sujet qui est désormais récurrent aux Etats-Unis, c’est la vie sentimentale du président français. La désormais fameuse affaire Trierweiler-Gayet a pris des proportions énormes outre-Atlantique. Pour Keneth Weinstein, ce thème risque de faire encore l’objet de nombreux articles et reportages : « François Hollande est devenu l’objet de plaisanteries infernales aux Etats-Unis, précise-t-il. Il est plus connu pour sa vie personnelle que pour sa politique. On va malheureusement parler de Madame Trierweiler, de Madame Gayet, plutôt que de sa politique en Centrafrique et au Mali. Les gens vont être très polis, mais pour faire simple, s’il y a la moindre phrase qui suggère quoi que se soit, les humoristes des shows télévisés vont s’en emparer ».
La vigilance sera de mise du coté français concernant le traitement médiatique que la presse américaine va réserver à François Hollande lors de cette visite d'Etat, la première depuis celle de Jacques Chirac en 1996. Une visite qui intervient presque trente ans jour pour jour après celle de son mentor en politique, François Mitterrand, en mars 1984.
■ Tribune commune : Hollande et Obama à l'unisson
Cette visite d’Etat est l’occasion pour les deux présidents de réaffirmer le partenariat qui lie les deux pays depuis plus de deux siècles. C’est ce qu'ils ont déclaré dans une tribune conjointe publiée dans les quotidiens Le Monde et le Washington Post.
Intitulée « Une alliance transformée », cette tribune fait le point sur l’état des relations entre les deux pays, mais également les objectifs qu’ils se fixent en matière de coopération et de politique internationale.
Les deux présidents abordent les sujets qui leur ont permis de se rapprocher depuis maintenant quelques années. Le dossier du nucléaire iranien et le dossier syrien donc, sur lesquels les deux puissances semblent parler d’une même voix, démontrent la nature de cette nouvelle relation : « Un modèle de coopération internationale », selon eux.
Mais plus que ces deux dossiers, c’est l’Afrique qui résume parfaitement le nouveau partenariat franco-américain. L’intervention française au Mali, la lutte contre le terrorisme et plus particulièrement contre al-Qaïda, et la récente intervention en Centrafrique en sont la preuve. Les deux présidents souhaitent y consolider les institutions démocratiques et permettre aux forces armées du continent africain d'assurer elles-mêmes la sécurité, en contribuant notamment à leur entraînement.
Cette coopération franco-américaine se traduit également sur d'autres terrains : économique, scientifique et en matière de lutte contre le changement climatique.
Autant de dossiers sur lesquels les deux présidents partagent le même point de vue et les mêmes ambitions. Cette alliance franco-américaine doit favoriser la mise en place d' « un monde plus sûr », concluent Barack Obama et François Hollande.
Pour aller plus loin, rendez-vous ce lundi soir dans l'émission Décryptage à 18h10 TU sur l'antenne Afrique et 19h10 TU sur l'antenne Monde : Barack Obama déroule le tapis rouge pour le président mal-aimé. Avec Eddy FOUGIER, politologue, chercheur associé à l’IRIS.