Les Boliviennes de plus en plus nombreuses à émigrer

Le phénomène inquiète les autorités boliviennes : la migration est en forte hausse ces dernières années et elle a tendance à se féminiser. Entre 2001 et 2009, le nombre d’immigrés boliviens présents en Espagne a été multiplié par 34! Une étude toute récente montre également une féminisation de la migration, dûe à la crise dans le secteur espagnol de la construction : les femmes représentent aujourd’hui 56% de la population bolivienne vivant en Espagne. Cette féminisation de la migration engendre des conséquences particulières dans une société bolivienne fortement machiste et où les enfants d’émigrés souffrent de leur statut.

 

Avec notre correspondant à La Paz, Reza Nourmamode.

Avec les deux tiers de sa population vivant sous le seuil de pauvreté, et régulièrement secouée par des crises politiques, la Bolivie a toujours été un pays de migration. Et c’est désormais l’Espagne qui est en tête des pays d’accueil. En à peine dix ans, la population bolivienne y est passée de 3 000 à plus de 250 000 personnes. Avec un phénomène nouveau : une migration en majorité féminine.

Monica Corona, de la fondation AbriendoMundos s’en explique : « Dans le phénomène migratoire traditionnel en Amérique Latine, c’est l’homme qui migre. Or durant les dix dernières années, on a assisté à un processus de féminisation de la migration. Cela répond à une série de situations. La crise et la pauvreté dans les pays d’origine, par exemple. Mais de plus, en Bolivie, 25% des familles ont à leur tête une femme. Et ce sont elles qui doivent résoudre les problèmes économiques et matériels ».

La féminisation du phénomène migratoire en Bolivie a des répercussions particulières dans la société locale. Pour Wilge Arandia, le psychologue de l’association des émigrés boliviens en Espagne, « On valorise trop la famille idéalisée, papa, maman, enfants, alors qu’il y a une incroyable diversité de familles dans notre pays. Mais les valeurs inculquées par ceux qui sont en charge de l’éducation restent collées à cette famille supposée idéale. Et donc, ceux qui n’ont pas ce type de famille font l’objet d’une certaine exclusion ».

Manne financière

Dans le domaine économique, l’argent envoyé par les émigrés représente une somme considérable pour la Bolivie. Il constitue même la seconde rentrée financière après les revenus de la vente des hydrocarbures. Les femmes y participent pour près de 60%.
Un flux de devises qui n’est pas forcément une sinécure pour le pays, explique Alfonso Hinojosa, directeur du régime consulaire bolivien : « 60% de l’argent envoyé par les migrants va aux besoins quotidiens. A l’alimentation et aux dépenses nécessaires pour que ces familles qui ont des membres à l’étranger arrivent à la fin du mois. Ce n’est qu’exceptionnellement que cet argent serve à des économies ou à une utilisation productive. Il ne diminue pas la pauvreté».

Suite à la crise économique qui a frappé l’Espagne en 2008, les possibilités d’emploi et les salaires proposés aux Boliviennes ont fortement baissé. Nombre d’entre elles ont donc décidé de revenir au pays même si la situation économique y demeure très précaire.

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