Avec notre correspondante à Port-au-Prince
Par petits groupes, les élèves passent la grille d'entrée du lycée national de Pétionville. Dans la cour de l'établissement, les tentes fournies par l'UNICEF sont désormais vides : le bâtiment de deux étages n'a pas été détruit le 12 janvier et c'est donc dans les salles de classes que les cours vont avoir lieu.
« Cela va nous retirer un peu de stress », explique William Souffrain, « parce qu'avec les tentes sous les yeux, certains élèves pensent qu'un séisme pourrait revenir. Je rentre en seconde et je suis confiant : l'année va se passer sans problème ».
Dans les rues de Port-au-Prince, les enfants en uniformes ne sont pas encore aussi nombreux que les années passées. Plus de 4 000 écoles ont été détruites lors du tremblement de terre. Si les opérations de déblaiement ont débuté, la tâche est immense et les débris encombrent encore la majorité de ces terrains : aucune tente-école ne peut donc y être installée.
Des dispositions pour soulager les parents
Aussi, le séisme a aggravé les conditions de vie, déjà précaires, d’un grand nombre de familles haïtiennes : ceux qui ont tout perdu le 12 janvier se voient aujourd’hui dans l’incapacité de payer les frais de scolarité de leurs enfants. Se voulant rassurant, le ministre de l’éducation, Joël Desrosiers Jean-Pierre, a déclaré que l’Etat allait prendre des dispositions pour soulager les parents, comme la subvention des manuels scolaires et la poursuite d’un programme de cantine scolaire, en partenariat avec le Programme Alimentaire Mondial.
Mais en dépit de l’annonce officielle de rentrée, les cours n’ont pas encore réellement repris dans les écoles publiques. « Nous n’avons pas de professeurs mais c’est habituel », explique Gerla Laguerre, 18 ans, « c’est souvent comme ça la première semaine nous ne nous inquiétons pas ». La jeune fille passera ses premières épreuves du bac à la fin de l’année.
Dans les écoles privées de la capitale, les cours ont repris, souvent depuis plusieurs semaines mais au lycée national de Pétionville, les élèves attendent dans leur salle, circulent dans les couloirs. Avec quelques camarades de sa classe, Gerla va passer la journée assise sur les bureaux rangés sous le préau du lycée.
« Avant le séisme, un enfant sur deux n’était pas scolarisé »
Beaucoup d'enseignants du public tardent à faire leur rentrée scolaire car ils attendent que le gouvernement leur verse leurs salaires ; certains n'ont pas été payés depuis plus de trois ans et aucune date n’a été fixée pour le paiement de ces arriérés. Lundi 4 octobre 2010, journée officielle de la reprise scolaire, un petit nombre a manifesté devant le ministère de l’Education pour dénoncer la gravité de la situation.
Au sommet international des donateurs, le 31 mars dernier à New York, le président de la République René Préval avait fait de l’éducation sa priorité mais « moins de 10% du budget national est accordé à l’éducation », dénonce Josué Mérilien à la tête de la mobilisation. « Avant le séisme, un enfant sur deux n’était pas scolarisé. Aujourd’hui, nous demandons la réouverture des écoles pour tous les Haïtiens, pas seulement pour ceux qui ont de l’argent ».