De notre correspondante à Brasilia,
Tous les quatre ans, le refrain est le même : le Brésil est favori !!! Son palmarès inégalé lui sert de sauf-conduit : cinq trophées ramenés à la maison depuis 1958. La planète foot avait alors découvert un nouveau jeu flamboyant, « le football samba ». De l´attaque, des buts, de beaux dribbles et du plaisir à voir des joueurs la balle au pied.
« Les Noirs ont offert une formidable touche artistique » assure Joël Rufino, universitaire auteur d´un ouvrage sur les Noirs dans le football brésilien. Leur rôle et leur présence furent longtemps niés : aujourd´hui encore, les supporteurs de Fluminense lancent des tribunes de la farine... pour rappeler cette poudre de riz dont on engluait le visage des joueurs trop « colorés », alors interdits de match. Sous le soleil tropical, le spectacle durant la partie devait être assez drôle, ou préoccupant ?
Mais la globalisation s´est aussi immiscée dans le style Made in Brazil ! Le futebol samba, plaisant mais infructueux comme en 1986, a laissé place au football résultat. Comme ailleurs... les enjeux sont trop grands. Les Brésiliens ont donc l´une des meilleures défenses du monde, axée autour de Lucio et du gardien de but Julio Cesar, tous deux champions d´Europe sous les couleurs de l´Inter de Milan.
Mais le « style Dunga », l´ancien milieu de terrain défensif, surnommé en son temps « le bucheron » et devenu entraîneur, ne fait pas l´unanimité... En dévoilant sa Seleção pour l´Afrique du Sud, il a fait beaucoup de mécontents dans la salle de presse où le guettaient trois cents confrères. L´ex-capitaine de l´équipe vainqueur en 1994, s´est défendu près de deux heures sur l´absence de certains noms : Ronaldinho Gaucho, milieu de terrain en fin de carrière mais toujours créatif, le buteur costaud Adriano, et les deux révélations du championnat brésilien, Neymar et Ganso, vedettes de Santos, le club de Pelé.
« Ne craignez-vous pas d´entrer dans l´histoire pour ne pas avoir emmené ces "gamins en or " qui jouent mieux que huit ou neuf de vos joueurs ? » lui a demandé un des journalistes les plus véhéments. Ce jour-là, Dunga a été comparé à César Menotti, l´entraîneur de l´Argentine en 1978, qui avait rayé Diego Maradona de sa liste.
« En 1974, alors que je venais d´être élu le meilleur du championnat brésilien, on ne m´a pas donné ma chance, regrette encore Zico, l´ancien international et éternelle star de Flamengo, dans un entretien à RFI. J´aurais emmené ces jeunes, qui sont aujourd´hui la crème de la crème, des joueurs fantastiques qui font comme les grands joueurs : la différence... Et c´est pour ça qu´il y a eu cette clameur nationale ».
Et cette déception: les Brésiliens ont une nature de supporteurs, mais ils se sentent orphelins de stars et de beau jeu. Pourtant, Dunga, qui n´avait jamais été entraîneur, a effectué le travail demandé au lendemain de la défaite en quart de finale, en Allemagne, en 2006 : renover les stars vieillissantes, Ronaldo, Roberto Carlos, Cafu, Juninho... et imposer la rigueur, de jeu et de comportement.
Un travail qui a donné des résultats : une belle campagne de qualification, une Copa America en 2007, une Coupe des confédérations en 2009. En attendant... de ramener le trophée, pour le défendre ici. La Coupe du monde de 2014 aura en effet lieu sous les tropiques brésiliens.