Venezuela: l’organisation des législatives entachée de plusieurs irrégularités

Quelque 20 millions de Vénézuéliens sont appelés à se rendre aux urnes ce dimanche. Le parti au pouvoir, le PSUV, devrait facilement retrouver sa majorité à l’Assemblée nationale, dominée par l’opposition depuis cinq ans. Aujourd'hui, en effet, une grande partie de cette opposition a décidé de boycotter ces législatives. Elle estime que le scrutin ne sera ni juste ni équitable. Des accusations partagées par une partie de la communauté internationale ainsi que plusieurs organisations indépendantes, qui dénoncent des irrégularités dans la préparation de ces législatives.

Avec notre envoyée spéciale à Caracas, Marie Normand

Les Vénézuéliens découvriront de toutes nouvelles machines à voter pour ces législatives. Ils pouvaient déjà les tester depuis plusieurs semaines.

Le Conseil national électoral veut jouer la transparence. Mais Roberto Abdul s’inquiète des conséquences de l’incendie qui a touché le bâtiment de ce CNE au mois de mars. Il préside l’organisation vénézuélienne Sùmate qui scrute les processus électoraux depuis 19 ans. « Presque tous les équipements du système de vote automatisé ont été perdus dans cet incendie », déplore-t-il.

Les machines à voter, les systèmes d’identification biométrique, tout a dû être racheté et confié à des fournisseurs dans la plus grande opacité, soutient Roberto Abdul. Il souligne aussi le manque d’actualisation des listes électorales : « Quelque 2,7 millions de personnes sont toujours enregistrées comme résidentes alors qu’elles vivent à l’étranger, selon nos estimations. Si cette diaspora et les migrations internes étaient prises en compte, cela affecterait un peu la taille des circonscriptions. »

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66% de sièges ajoutés à l'Assemblée nationale

Roberto Abdul souligne au passage que le nombre de sièges à l’Assemblée a été augmenté de 66% de façon unilatérale, ce que l’organisation qualifie de violation de la Constitution. Si Sumate ne donne pas de consigne de vote, ne prône pas l’abstention, elle estime que le processus transgresse tous les principes de transparence et d’équité.

Une opinion que ne partage pas Enrique Ochoa Antich. Cet ancien député et fondateur du MAS, un parti de centre gauche qui participe au scrutin, estime que ces accusations de fraude sont infondées. « Le système électoral vénézuélien ne permet pas la fraude, assure-t-il. S’il était possible de truquer les élections, nous n’aurions jamais remporté les principaux sièges de gouverneur du pays en 2008. S’il était possible de frauder, nous n’aurions jamais remporté en 2009 la mairie de Barinas, dans l’État où l'ancien président Hugo Chavez est né et où la famille Chavez contrôle tout. Depuis, le système électoral est resté exactement le même. »

Enrique Ochoa Antich affirme aussi que les logiciels, les machines à voter, « tout a été contrôlé par l’opposition qui se présente aux élections » : « Oui le gouvernement abuse de son pouvoir, mais dans ces élections, je crois qu’on peut dire qu’il en abuse moins qu’avant. Cette invention d’une fraude électorale a seulement servi à détruire l’opposition et renforcé le gouvernement. Elle a détruit la confiance dans le principal instrument de lutte que nous avons, à savoir le vote. Face à un régime autoritaire, le vote est le principal instrument de lutte. »  

 

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