♦ Libération de prisonniers
Du côté des défenseurs des droits de l’homme, on salue d’importantes avancées. Et en particulier, la libération progressive des prisonniers politiques. Selon le ministère de la Justice, 574 prisonniers ont été libérés. La majorité, 385, suite à une grâce présidentielle et une cinquantaine en vertu de la loi d’amnistie votée en 2014 mais encore partiellement appliquée. Le reste, 142 prisonniers, dans le cadre de remises en libertés conditionnelles. Parmi eux des cas dits « emblématiques » : l’avocat Firmin Yangambi, l’opposant Jean-Claude Muyambo et même l’opposant Eugène Diomi Ndongala.
574 libérations à ce jour, c’est donc moins que les 700 libérations annoncées. Mais « ce n’est que le début », assure-t-on au ministère de la Justice. En l’absence de liste préétablie de prisonniers à libérer, explique-t-on, il revient aux différents parquets et responsables de prison d’identifier qui rentre ou non dans les critères décidés par la présidence et « cela prend du temps ».
Les organisations de défense des droits de l’homme ont bien constaté la réalité de cette vague de libération mais sans être en mesure pour l’instant de confirmer les chiffres ni l’exhaustivité de la mesure. Elles saluent ces libérations tout en regrettant le « pouvoir discrétionnaire trop grand » laissé aux directeurs de prison dans ce dossier.
Quant à la fermeture annoncée des cachots, officiellement, c’est une réalité. Et selon plusieurs sources, l’Agence nationale de renseignement s’est bel et bien vidée. Mais l’Asadho s’inquiète du sort d’au moins quatre personnes détenues, selon elle, depuis mars et avril dans les locaux des renseignements militaires de la capitale Kinshasa. Ce que dément une source sécuritaire.
♦ Ouverture de l'espace public
Du côté du bureau des Nations unies pour les droits de l’homme, on salue également, « l’ouverture progressive de l’espace public ». Plusieurs radios d’opposition fermées sous Kabila ont pu rouvrir, l’opposant Martin Fayulu a pu tenir meeting sans être inquiété, la télévision nationale s’en est même fait l’écho, et l’horizon s’est éclairci pour Moïse Katumbi, qui s’est vu octroyer un passeport et dont les condamnations et autres poursuites tombent les unes après les autres. Mais il reste des ombres au tableau.
Abdul Aziz Thioye, qui gère le bureau des Nations unies aux droits de l’homme, déplore par exemple que les activités des mouvements citoyens « continuent à être parfois réprimées », même s’il constate que ce n’est plus « systématique » comme avant. Il s’inquiète aussi des restrictions au droit de manifester qui continue d’être en vigueur à Tshikapa dans le Kasaï. Il estime qu’il faut rester prudent avant de se réjouir et continuer d’observer l’évolution de la situation.
♦ Une justice qui piétine
Mais c’est surtout dans le domaine de la lutte contre l’impunité pour les crimes de l’ère Kabila que les défenseurs des droits de l’homme restent sur leur faim. Il n’y a toujours pas d’avancée notable, par exemple, dans l’enquête sur les massacres de Yumbi de décembre, ni de perspective de justice pour les morts tués par les forces de sécurité au cours des marches pacifiques organisées par l’Église l’an passé.
« Il y a plusieurs dossiers qui concernent les membres de l’armée, les membres de la police, les membres de la famille politique du président Joseph Kabila qui ne sont jamais instruits et dont on ne connaît pas la suite, déplore Jean-Claude Katende, de l'Asadho. Nous avons l’impression que la justice traîne des pieds. »
Le défenseur des droits de l'homme évoque le dossier Yumbi mais aussi celui de la mort de l'activiste Rossy Mukendi où, dit-il, « nous sentons que les choses ne marchent pas », ainsi que l'affaire Floribert Chebeya, dans laquelle il considère que « les véritables auteurs et commanditaires ne sont pas inquiétés ». Il demande notamment une réouverture du procès.