Il y a d'abord ces photos prises, comme à la hâte, peu de temps après la frappe et qui montrent dans les décombres d'une maison, deux corps sans vie, ni tête. Des voisins auraient vu des hommes barbus venir vite sur le lieu, probablement des jihadistes parlant l'arabe algérien et agissant rapidement par crainte d'une nouvelle frappe.
Selon les témoins c'est eux qui ont coupé les têtes de deux jihadistes tués par la frappe. Ils ont pris les têtes abandonnant les corps sur place. Sans doute pour empêcher leur identification, croit savoir un témoin. Les habitants d'Oubari disent remarquer souvent dans le ciel des drones depuis un mois.
Un haut responsable ou un jihadiste de second rang ?
Selon les Américains, cette frappe a permis de tuer Moussa Abou Daoud qui « était chargé de l'entraînement des recrues d'Aqmi en Libye. Il a fourni une indispensable aide logistique, des fonds et des armes à Aqmi, permettant aux terroristes de menacer des intérêts américains et occidentaux dans la région », précise le communiqué d'Africom.
Africom considère Moussa Abou Daoud comme un « haut responsable » d'Aqmi, mais les Algériens qui possèdent la plus grande base de données sur les jihadistes de la région n'ont pas du tout la même appréciation. Un responsable sécuritaire algérien confie à un quotidien local que, pour Alger « le nom d'Abou Daoud ne figure pas sur la liste des terroristes, le plus dangereux... Il figure en bas de nos listes », précise-t-il.
Les Algériens estiment que si Abou Daoud figure sur la liste du département d'Etat américain pour les terroristes étrangers les plus dangereux depuis mai 2016, c'est parce que Washington se fie à la version tunisienne concernant la valeur de cet homme. Ce jihadiste est en effet impliqué dans l'assassinat de neuf soldats tunisiens, en juillet 2013, à la montagne Ashaanbi, près de la frontière algérienne.
Qui serait le second jihadiste tué ?
Quoi qu'il en soit, sur le terrain en Libye et dans la presse locale, un autre jihadiste est cité comme étant victime de la frappe américaine. Il s'agit d'un autre Algérien, Abou Abd al-Rahmane al-Hawari, qui serait le bras droit de Mokhtar Belmokhtar, qui avait rejoint Aqmi et qui serait mort par une frappe française en 2016 en Libye.
S'agit-il alors du deuxième homme dont Africom ne révèle pas l’identité où s'agit-il du chef visé qui serait alors Abou Abd al-Rahmane al-Hawari, et non pas Moussa Abou Daoud ?
Le début d’une campagne plus large en Libye ?
Les Etats-Unis, qui cherchent depuis 2015 à étendre leurs bases de drones en Afrique, possèdent désormais une base de renseignements comprenant un aéroport et des drones en Tunisie. Washington explique que c'est pour surveiller la Libye. Elle possède également une base de renseignements au sud de la ville de Syrte et ceci depuis la fin des combats contre le groupe EI en juillet 2016. Le but annoncé de cette base étant de contrôler les groupes armés en Libye.
Si la frappe américaine à Oubari est la deuxième en Libye depuis l'arrivée au pouvoir de Donald Trump, dans le nouveau projet du budget militaire, qui prévoie un financement pour la surveillance aérienne, la Libye est mentionnée.
Washington pratique actuellement ce système de surveillance et de frappes aériennes menées, depuis des années, par des drones, en Somalie et au Yémen. Ces frappes constitueront-elles un début de campagne pour la Libye ?