C’est le frère cadet d’Etienne Tshisekedi, Mgr Gérard Mulumba, qui a célébré la messe. Il a vanté le parcours d’un homme « guidé par l’amour de son peuple au point de sacrifier ses propres intérêts » au moment où la plupart de ses collègues faisaient plutôt le contraire. Un discours salué par l’assistance : « Le discours nous fait en tout cas du bien. Puis en même temps, j’ai beaucoup de tristesse. Il est toujours resté fidèle à ce que le peuple voulait. Nos politiciens d’aujourd’hui nous donnent vraiment l’impression de ne pas aimer ce pays ».
Au premier rang, les enfants d’Etienne Tshisekedi, quelques compagnons de route et des représentants du rassemblement, mais également des Congolais non partisans, touchés par le combat d’Etienne Tshisekedi pour la démocratie : « Je ne suis pas partisan de l’UDPS [Union pour la démocratie et le progrès social], mais dans un pays il y a des grands personnages qui incarnent l’espoir d’une nation. Et il fut parmi les plus grands dans ce pays. Voilà pourquoi nous sommes venus l’honorer. C’est-à-dire il voulait qu’il y ait un Etat de droit ».
« Je ne mourrai pas avant la victoire »
« Je suis Tshisekedi. Je ne mourrai pas avant la victoire », repris en cœur par les militants de l’UDPS. Au micro, maître Jean-Joseph Mukendi, compagnon de route d’Etienne Tshisekedi qui lance un appel aux militants à ne pas baisser les bras quand bien même ils se sentent orphelins : « Il y a des personnes qui pensent qu’avec la mort de Tshisekedi, le combat s’est arrêté. Ils se trompent parce que l’esprit de Tshisekedi, notamment ses valeurs qu’il nous a incarnées, nous les avons tellement intériorisées qu’aujourd’hui, il n’y a pas un seul Tshisekedi, il y a des millions de Tshisekedi qui peuvent continuer ce combat dans la dignité ».
Entretenir les mémoires pour rehausser la mobilisation malgré un contexte difficile. A la tribune, les orateurs se succèdent, partagent leurs souvenirs, insistent sur la droiture d’Etienne Tshisekedi dont le portrait géant recouvre tous les murs. Augustin Kabuya, porte-parole du parti : « Les gens doivent comprendre ce qui a été la philosophie, la vision, les combats politiques d’Etienne Tshisekedi. Je peux vous dire aussi que cela fait partie de notre stratégie de sensibilisation de notre base puisque nous utilisons le nom de Tshisekedi. C’est stratégique et politique aussi. Même les gens qui nous ont quittés, continuent à utiliser le nom de Tshisekedi pour séduire les esprits faibles. Et nous, les héritiers politiques d’Etienne Tshisekedi, nous ne pouvons pas faire de concession avec des opportunistes pareils ».
Pas question non plus, explique Jean-Marc Kabund, le secrétaire général du parti, de renoncer à l’Accord de la Saint-Sylvestre dévoyé, selon lui, et que beaucoup ici considèrent encore comme le testament politique d’Etienne Tshisekedi.
Nostalgie
Beaucoup de nostalgie dans la capitale ce jeudi matin, un peu de colère aussi vis-à-vis de ceux qui, depuis le décès d’Etienne Tshisekedi, ont quitté le parti : « Malheureusement, certains nous ont quittés parce qu’ils avaient assez combattu à leur avis, et qu’ils se rendaient compte qu’avec la disparition d’Etienne Tshisekedi, ça leur est très difficile de pouvoir tirer un bénéfice matériel de leur combat. Et c’est malheureux aujourd’hui de constater qu’il y a plusieurs messes éclatées dans la ville de Kinshasa ».
Une autre messe a eu lieu hier dans l'après-midi. Un office religieux organisé par la faction du Premier ministre Bruno Tshibala revendiquant lui aussi le nom de l’ Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS). Le Premier ministre congolais, Bruno Tshibala, a promis le rapatriement dans « quelque temps » du corps de l'opposant historique Etienne Tshisekedi, lors de la célébration du premier anniversaire de sa mort. « Nous allons, c'est une question de quelque temps, tout faire pour que le corps [de Tshisekedi] soit rapatrié et que nous puissions lui réserver des funérailles grandioses, dignes de son statut », a déclaré Bruno Tshibala lors d'une messe à la mémoire de l'opposant. Faute d'accord entre les autorités et sa famille, le corps d’Etienne Tshisekedi attend toujours dans une morgue en Belgique son rapatriement et son inhumation en République démocratique du Congo.
Trois messes différentes au total ont donc été célébrées à Kinshasa ce jeudi en hommage à celui que beaucoup voudraient voir élever au rang de héros national. Et selon l’attachée de presse de Félix Tshisekedi, des sympathisants ont accompagné le fils du défunt sur le boulevard du 24-Novembre à la sortie de la messe avant d’être dispersés à coup de gaz lacrymogène. Interrogé par RFI, le patron de la police nationale, le général Sylvano Kasongo, dit attendre un rapport sur la situation avant de se prononcer.