Michael Sharp et Zaida Catalan avaient rendez-vous avec un chef d'une des délégations de la cour Kamuina Nsapu venue négocier un accord avec le gouvernement congolais. Nous sommes à la veille de la mort des deux experts. Ils préparent une mission dans la localité de Bunkonde à deux heures de route de Kananga où, disent-ils, ils espèrent en savoir plus sur des groupes de miliciens « très différents » de ce qu'ils savent des adeptes de Kamuina Nsapu. Des miliciens « mieux armés » notamment.
L'interlocuteur des deux experts ne parle pas français. A plusieurs reprises, il met en garde les deux experts contre l'idée de se rendre à Bunkonde et leur suggère de se rendre plutôt dans le village Kamuina Nsapu, où il pense pouvoir contrôler les miliciens. Mais jamais ces mises en garde en ciluba, la langue locale, ne seront traduites, au contraire. Toutes les garanties de sécurité sont données. Et parmi les personnes qui mentent aux deux experts, RFI a réussi à identifier leur interprète présumé : Betu Tshintela qui va les accompagner, son cousin José Tshibuabua, agent de l'agence nationale des services de renseignement, l'ANR. Et un membre de la famille royale, proche du nouveau chef, Thomas Nkashama qui ment sur son identité et se fait appeler Tom Perriello, du nom de l'ancien envoyé spécial américain. Selon des proches et des témoins, Thomas Nkashama est aujourd'hui agent d'un autre service de sécurité congolais, la DGM.
Officiellement, le gouvernement congolais a dit après la mort des deux experts ne jamais avoir été informé de cette mission. Thomas Nkashama et José Tshibuabua n'ont jamais comparu devant le tribunal de garnison militaire de Kananga. Ils étaient tous deux injoignables ces derniers jours. RFI n'est donc pas en mesure d'expliquer les motivations.
■ Jean Bosco Mukanda, l'étrange témoin du procès de Kananga
Le principal témoin du crime est un informateur de l'armée congolaise, un chef de milice supplétif des FARDC, disent même des habitants de Bunkonde, ce que Jean Bosco Mukanda dément. Ces six derniers mois, le témoin était surtout un quasi-auxiliaire de justice pour l'ONU comme la justice congolaise. C'est Jean Bosco Mukanda qui a indiqué la tombe des deux experts tués. Encore lui qui a désigné de potentiels suspects aujourd'hui arrêtés.
Devant la cour, l'excellent témoin dit avoir assisté à l'exécution, tout en assurant avoir été lui-même presque tué un mois plus tôt par les mêmes miliciens mais qui, ce jour-là, ne l'auraient pas inquiété.