C'était dimanche 3 avril, vers 14h, le long d'un marché très fréquenté d'Asmara. La foule, mais aussi des autobus et des taxis ralentissent la progression d'un convoi militaire d'une quinzaine de camions. A bord : des jeunes recrues du très redouté service national, en route vers un chantier de construction. Plusieurs conscrits profitent du ralentissement : ils sautent et s'enfuient.
Les soldats qui les gardent menacent tandis que la foule s'agite pour protéger les fugitifs. Mais soudain, les soldats ouvrent le feu. On entend des cris. « Gedef ! Gedef ! Arrêtez ! » Le témoin s'éloigne pour se mettre à l'abri, son téléphone toujours allumé.
Pendant plusieurs jours, le gouvernement est resté silencieux, comme à son habitude. C'est la diffusion de cet enregistrement, la semaine dernière par Radio Erena, qui a contraint le puissant ministre de l'Information à réagir.
Selon Yemane Ghebremeskel, deux conscrits ont bel et bien été tués, mais en sautant des camions qui les transportaient. Onze blessés, toujours selon lui, ont été conduits à l'hôpital, après que des soldats ont « stabilisé la situation en tirant en l'air ».
De son côté, le rédacteur en chef de Radio Erena, Biniam Simon, explique à RFI que ce n'est pas la première fois qu'un tel drame se produit, à cet endroit précis. Il y a deux ans, deux recrues du service national auraient déjà été abattues après avoir tenté de s'échapper. Le gouvernement érythréen était resté silencieux.