Sept bateaux chargés de combattants ont débarqué lundi après-midi dans les dunes bordant le petit village de Gara'ad, sur le rivage de l'océan Indien. Plusieurs dizaines d'insurgés du groupe Shebab ont alors rapidement pris position dans cette localité faite d'une cinquantaine de maisons, dans la région semi-autonome du Puntland. Leur drapeau, disent les témoins, a flotté toute la nuit au-dessus des maisons de pêcheurs.
Mais les insurgés se sont retirés ce matin, selon un ministre du Puntland, qui a indiqué que les troupes loyales au gouvernement régional ont repris le contrôle du secteur. Selon des dignitaires locaux, les Shebabs se seraient ensuite divisés en petits groupes. Ils auraient pris position dans un autre petit port, plus au nord, ainsi qu'à l'intérieur des terres, vers les collines de Galgalla, un ancien repaire des pirates où, il y a quelques années, ces derniers rançonnaient les bateaux au large de la Somalie.
C'est la première incursion des islamistes liés au groupe al-Qaïda dans cette région autonome, dont les relations avec le gouvernement fédéral siégeant à Mogadisico sont toujours tendues. Les autorités du Puntland ont d'ailleurs mis en cause une manoeuvre du gouvernement fédéral dans cette poussée des Shebabs. Elles ont immédiatement décrété l'état d'urgence sur l'ensemble de leur territoire.
Un développement dangereux de la guerre
L'infiltration au Puntland de combattants du groupe al-Shebab est un développement dangereux de la guerre menée en Somalie contre l'insurrection jihadiste. Selon un analyste somalien, elle prouve que la capacité opérationnelle de la rébellion, affiliée à al-Qaïda, n'est pas aussi réduite que certains responsables, à Mogadiscio ou à Nairobi, semblent le croire. Et elle porte la guerre sur le territoire du Puntland, une région autonome qui entretient déjà des relations tendues avec ses voisins.
Le gouvernement fédéral a d'ailleurs aussitôt été accusé par le Puntland de laisser passer les jihadistes dans le but de le déstabiliser. Mogadiscio et les autorités du Puntland sont en effet engagés dans un bras de fer autour de la question de l'élection présidentielle qui doit avoir lieu en Somalie en septembre.
Les Shebabs au Puntland, selon un autre analyste, c'est donc l'ouverture de nouveaux fronts difficilement contrôlables, alors que les islamistes sont réduits, dans le sud somalien, à des repaires épars dans l'arrière-pays. Une situation, donc, potentiellement explosive. D'autant que le Puntland, c'est aussi la région où un petit groupe dissident des Shebabs a, l'année dernière, fait allégeance au groupe Etat islamique. Lequel pourrait profiter de la confusion des opérations de traque pour tenter de s'implanter durablement.